Bad Religion

Bad Religion >> The Empire Strikes First

Contexte :

Alors que beaucoup de gens pressés avaient bien vite enterré le groupe suite au somptueux mais plus calme No Substance et après le certes demi-ratage de The New America, Bad Religion avait remis tout le monde d’accord, les vieux aigris comme les jeunes aux dents longues, avec la claque de The Process Of Belief en 2002. Deux ans plus tard, beaucoup d’évènements géopolitiques, luttes et autres révoltes civiques suscitées par des idéologies plus ou moins douteuses, ont eu lieu… De quoi inspirer un des plus grands groupes de l’histoire du punk rock. L’année 2004, en plus de l’anniversaire des 20 ans de mon frangin et de celui des 20 ans du dessin animé Transformers de notre enfance... c’est aussi et surtout celui de la reformation du groupe à l’arrivée de G. Hetson des Circle Jerks en 84. Pour cette occasion le groupe a ressorti cette année-là ses premiers albums en version remasterisée.

Chronique :

Le groupe aurait-il profité de ces rééditions pour se replonger dans ses racines, le son crade à souhait des grattes d’Hetson et Gurewitz sur la décapante « Sinister Rouge » (qui ouvre l’album) pourrait le laisser penser, une fois l’intro instru ambiancée posée par « Overture ». Le ton est donné et l’heure est grave. Le groupe nous revient donc en grosse forme, les papys font de la résistance et sont, qui plus est, en colère !

Commençons par le commencement avec le titre de l’album très évocateur. Derrière son apparente simplicité celui-ci fait doublement référence à un des symboles impérialistes par excellence (comme Caca-Colé, ou Mc Dollar… pas de pub !), c’est-à-dire ‘Georges Lucas’… Ainsi, « l’empire contre-attaque » est détourné en « l’empire frappe en premier » et évoque bien sûr l’idéologie toute récente et très contestable de "Guerre Préventive" utilisée par Bush Jr. et ses faucons du Pentagone (Paul Wolfowitz, Richard Perle et Donald Rumsfeld) pour attaquer l’Irak en 2003.
La seconde allusion à Dark Vador and Co., est la référence à la lubie de Ronald Reagan qu’on appelle communément le projet ’Star Wars’, qui désigne la thèse reprise dans le programme électoral de Georges W. Bush selon laquelle l’Amérique doit pouvoir se protéger de toute attaque extérieure par un bouclier anti-missile, couvrant tout son territoire, et qui serait basé en Alaska. En dépit bien sûr de tous les accords internationaux sur la non-prolifération nucléaire et la non-course à l’armement. Ce projet « Guerre des Etoiles » fut largement contesté mais aussi largement ré-évoqué depuis le fameux 11 septembre 2001...

Bref comme à l’habitude, les Bad Religion ne sont pas revenus pour nous raconter des histoires de p’tites copines aux seins refaits… On retrouve cette plume poétique et imagée de Graffin, traitant avec finesse de sujets de citoyenneté, de philosophie, de dérives de la société moderne etc… mais aussi un aspect plus pamphlétaire fustigeant la religion, le retour à l’ordre moral et le messianisme américain. La guerre en Irak et la société de l’info spectacle (« l’infotainment » comme on dit maintenant) sont les autres grands thèmes évoqués dans cet album. On pourrait citer presque tout l’album tant les lyrics de Greg Graffin sont prenants, alliés à cette voix, toujours aussi belle.

Mais venons-en à la musique. Tous les gros atouts de Bad Religion sont toujours présents, « ça reste du Bad Religion pur jus » se lamenteront certains mais pour les fans, le groupe revient en grande forme et à plus d’agressivité, à commencer par son trio de guitaristes : Mr. Brett est toujours de l’aventure, Greg Hetson, le p’tit chauve à lunettes qui saute tout le temps et Brian Baker, le gratteux culte de Dag Nasty et Minor Threat. Les solos virtuoses (« The Quickening »…) de celui-ci sont très présents et apportent un réel plus et une dose de pèche énorme (« All There Is »). De son côté le son de Greg ‘#2’ est par instants plus gras, plus crade mais pas désagréable pour autant, un parti pris qui apporte aussi sa pierre à l’édifice nerveux de cet album. Même sur le très beau reggae « Boot Stamping On A Human Face Forever », on sent une colère plus ou moins fataliste poindre. La note d’espoir arrive en fin d’album avec la mélodie plus légère de « Live Again… » et ses magnifiques choeurs.

Ceux-ci sont bien sûr une autre constante dans le son du groupe, toujours aussi inimitable. Allergiques aux fameux ‘oozin’ aahs’ s’abstenir (« All There Is ») ! La présence des chœurs est toujours aussi emballante, pesante, outrancière ou mélodieuse, (fédérateurs sur « The Empire Strikes First »), c’est selon. Moi je suis un grand fan.

Les deux titres les plus marquants à mon avis sont situés en milieu d’album : « God’s Love » (la gratte old school, les solos de Baker, des accroches vocales à vous faire lever le poing) et « Let Them Eat War », plus motivant tu meurs. Ce dernier rentre tout droit au panthéon des meilleures tunes mid tempo du groupe, au même titre que les célèbres « Punk Rock Song », « A Walk », « Ten In 2010 » et j’en passe. Bad Religion est vraiment passé maître dans l’art du mid-tempo punk rock entraînant et énergique.

L’album va pêcher largement dans tous les éléments des albums précédents (tune bourrine en ouverture comme sur Process Of Belief, tunes calmes comme sur No Substance, mélodie omniprésente comme sur The Gray Race, quelques excès mélodiques comme sur The New America…). Des tubes comme le morceau-titre feront à n’en pas douter partie des classiques du groupe.

Cependant « To Another Abyss », très lente et mélodique avec ses 4 minutes 07 en compte bien une de trop au compteur. De même pour « Beyond Electric Dreams » trop longue à finir et par ailleurs assez passable. Toutefois mis à part ces deux chansons, le reste de l’album est du très bon BR (la classique « Atheist Peace », la mélodie de « Los Angeles Is Burning »…), surprenant même par la présence d’une sonorité de gratte plus « à l’ancienne » comme sur la nerveuse « Social Suicide », l’excellente « God’s Love », le défrisant single « Sinister Rouge »...

Bref un 12è vrai album au compteur pour le groupe qui ne prend décidément pas une ride. Le problème c’est peut-être qu’à faire des liftings à répétition on finit par se figer (regardez Sheila !). Les quelques originalités (l’orgue sur « Los Angeles Is Burning », le pont limite rap sur « Let Them Eat War »…), l’entrain et la pourtant grande variété de mélodies et de tempos ne suffiront sans doute pas, une fois de plus, à séduire les sceptiques de toujours. La faute à un manque d’originalité, toujours le même reproche. Bad Religion reste pourtant inimitable (« The Quickening »), prenant, engagé et intelligent, un groupe à part, définitivement…

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