nov.
5
2010
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Bad Religion >> The Dissent of Man |
Contexte :
Bad Religion a 30 ans en 2010, et n’a plus rien à prouver. Son aura n’a jamais été aussi forte dans le monde du punk rock, un tribute intitulé Germs Of Perfection (rien que ça !) doit même sortir à la fin de l’année. Le groupe vient d’offrir aux fans un set live téléchargeable gratuitement, les français ont, eux, pu apprécier le groupe (rare dans l’Hexagone) lors des festivals Au Pont Du Rock (Malestroit) et Lez’Arts Scéniques (Sélestat). Greg Graffin, qui vient de publier son livre « Anarchy Evolution », prépare pour la télévision une émission baptisée « Punk Professor » (excusez du peu…), le groupe est plus stable que jamais (4 albums sans changements de line up !), bref que demander de plus ? Vous reprendrez bien d’un nouvel album, non ? Le quatorze ou quinzième, on sait plus trop…
Chronique :
On sait plus trop, et c’est peut-être un problème au moment d’aborder ce disque si l’on n’a plus vraiment en tête l’intégralité de la discographie de Bad Religion. The Dissent Of Man est en effet l’album le plus lent et le plus rock et mélodieux des californiens depuis belle lurette. Quelque part entre Recipe For Hate et ce qu’aurait dû/pu être The New America sans l’absence de Brett Gurewitz à l’époque. Vous l’avez compris : terminée la parenthèse agressive, politisée… et très punk finalement. Nos papys du punk aspirent à un retour au songwriting tout en retenue, à une certaine diversification de leur set live aussi, on peut l’imaginer.
C’est comme cela qu’il faut appréhender cet album, pas autrement, sous peine de rester sur le bas-côté après 10 minutes de musique. Et il y a fort à parier que ce sera le cas de pas mal d’auditeurs. Bad Religion prend donc des risques en multipliant les escapades, les arrangements de guitares (notamment) très appliqués, les lignes de chants travaillées, les ambiances atypiques… Manière aussi de varier les plaisirs et de boucler la boucle avec l’ami et producteur Joe Barresi, présent aux côtés du groupe depuis The Empire Srikes First en 2004.
Il faut dire quand même que la bande des six ne joue pas tout à fait franc-jeu avec son auditoire sur ce début d’album, et c’est peut-être ce qui rend The Dissent Of Man un peu décevant au premier abord. Un peu maladroit d’avoir ainsi placé d’entrée de jeu « The Day That The Earth Stalled » qui démarre en trombe (pas d’intro de début d’album ici), « Only Rain » (superbe pièce signée Gurewitz), et le morceau de choix révélé sur le live gratos des 30 ans (appelons-le comme ça) « The Resist Stance » : trois tranches de Bad Religion pur jus, percutantes et fédératrices qui précèdent la première accalmie, l’excellente « Won’t Somebody », déjà entendue çà et là ces dernières années (notamment sur la version ‘deluxe’ de l’album précédent). Le groupe semble donc avoir voulu placer le fan dans de « bonnes conditions », en « terrain connu » (équipé martelage de B. Wackerman « de série »), avant de lui soumettre ce à quoi il voulait vraiment en venir sur cet album : le retour aux racines roots rock qui ont toujours imprégné de près ou de loin les mélodies et le songwriting de Bad Religion. L’exemple le plus frappant est surement « Cyanide », où il n’est pas étonnant de retrouver un featuring de Mike Campbell guitariste de Tom Petty and the Heartbreakers, CQFD.
Passés les 4 premiers titres, le groupe met donc en avant le single désigné : le très mollasson « The Devil In Stitches », symbole d’un album en demi... mmmh, bon disons en trois-quarts-teinte... Sauf exception, passer les trois minutes s’est souvent révélé un format inadapté à Bad Religion, c’est ce qui faisait du tort à The New America. Par contre ralentir le tempo et mettre en avant la mélodie est un art où le combo de San Fernando Valley est passé maître. Mais là où No Substance est sans compromis et assume cette option, The Dissent Of Man paraît parfois mal équilibré avec plusieurs passages à vide : « The Devil In Stiches », « Turn Your Back On Me », « Someone To Believe » qui n’apporte rien en plus de plagier un riff des Ramones, et la fin en eau de boudin sur les très passables « Where The Fun Is » et « I Won’t Say Anything » (pas mal de morceaux écrits par Mr Brett).
Heureusement, outre « Finite », lent et grave, le morceau le plus intéressant des bonus tracks ‘deluxe’, les pépites mid tempo sont quand même de la partie : « Pride And The Pallor », « Won’t Somebody », « Ad Hominem », très classe… Aux côtés de morceaux plus conventionnellement rapides comme « Wrong Way Kids » (taillé pour le live avec ses « woh-oh »), le superbe refrain d’« Avalon » (le fameux « watch out ! » qui va bien, le solo…), l’agressif « Meeting Of The Minds » qu’on jurerait tout droit sorti des sessions de l’album précédent etc…
The Dissent Of Man n’est donc pas l’album ultime de Bad Religion, la faute à une tracklist étrangement agencée et à des choix qui diviseront le public du groupe, là où ceux d’un The Process Of Belief avaient fait l’unanimité. Le groupe avait de toute façon prévenu plusieurs mois avant la sortie du disque. De ce point de vue, et contrairement à son artwork en trompe-l’œil simili-3D, cet album mérite qu’on s’y attarde pendant pas mal d’écoutes.
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