Contexte :

Generator marque la première vraie rupture pour Bad Religion : le départ de Peter Finestone. Il s’agissait du batteur historique du groupe, celui des premirrs succès, présent depuis le départ de Jay Zikrout en 1982 (au milieu de l’enregistrement de How Could Hell Be Any Worse), et depuis la reformation post-Into The Unknown (disque très controversé).

Un changement de line-up est toujours destabilisant pour un groupe mais particulièrement un changement de batteur quand il s’agit d’un groupe de punk rock. Pourtant l’arrivée de Bobby Schayer sera plutôt bénéfique (de mon point de vue), et c’est avec lui à la batterie que Bad Religion prendra une nouvelle envergure. Son style plus en nuances, tranche avec la frappe sans concession, mais peut-être plus punk, de Finestone, et sera un des éléments qui permettra au groupe d’étendre par la suite ses possibilités musicales (bien que certains regrettent le style des débuts, plus simple et direct). Toutefois Generator reste encore dans la droite ligne des 4 premiers albums.

Chronique :

Le groupe met cette fois 2 ans avant de sortir son nouvel opus. Après un Against The Grain plus dur qu’à l’accoutumée, Bad Religion prend le temps d’affiner ses compos et s’assimiler le nouveau venu : Bobby Schayer.

L’album s’ouvre sur ce qui est devenu un des monuments du groupe : la chanson-titre "Generator", pleine d’originalité, la mélodie du chant (redoublé tout en choeurs sur la majeure partie du morceau) très mise en avant, un break d’anthologie avec une montée de basse vers le refrain et un solo de fin superbe même si la chanson décroît vers une fin en fade (j’aime pas les chansons qui finissent en fondu(e) !...).

Des chansons plus classiques, speedées tout en mélodie et expédiées avec brio par une rythmique Schayer/Bentley qui assure, sont encore présentes ("Too Much To Ask", "Fertile Crescent", "Chimaera"), mais le mot d’ordre est "alternance" : une chanson rapide vient souvent après une plus lente etc... En effet des 5 premiers albums du groupe, Generator est sûrement l’album le moins rapide, ce qui ne l’empêche pas de paraître court, signe qu’on ne s’ennuie pas à l’écoute et cela du fait de cette diversité nouvelle. Des chansons au tempo modéré comme "No Direction" (mélodie et solo accrocheur, grand classique du groupe), changeant comme "Tomorrow" (Schayer excellent, grande ligne de basse...), mid-tempo comme "Only Entertainment" (mélodie originale, choeurs et textes très bons) ou très agressif comme sur le grand classique "Atomic Garden" elle aussi très originale ; donnent une sensation de variété et donnent l’album plus abouti et jamais lassant.

De plus la vitesse enjouée (sentiment rare sur cet album) de "Heaven Is The Fall" contraste avec les chansons lentes et sombres comme "Two Babies In The Dark" et "The Answer", un hymne du groupe où la mélodie des choeurs, le solo de fin et le chant envoûtant de Graffin servent un excellent texte. Tout comme dans ceux de "No Direction", "Too Much To Ask" ou "Fertile Crescent", où le groupe évoque les dangers des prophètes modernes, de l’uniformisation de la pensée par les médias et des modes de vie calqués sur des modèles illégitimes. Bad Religion refuse pourtant de jouer le rôle de donneur de leçons tout en assumant celui de faire ouvrir les yeux.

"Only Entertainment", "Tomorrow", "Too Much To Ask" et "Generator" se révèlent être les meilleurs morceaux d’un album, plus frais, plus divers, sentant bon le renouvellement et où rien n’est à jeter. Le coté apaisé, plus sombre, plus propre pourra en rebuter certains même si la sonorité générale du disque est fidèle au ton des précédents opus. Les vrais premiers changements sont à venir dans l’album suivant où le groupe assumera cette volonté de ralentir le mouvement pour élargir ses possibilités et creuser du côté mélodique.