Bad Religion

Bad Religion >> New Maps Of Hell

Contexte :

Trois ans pour sortir ce nouvel album, depuis bien longtemps le groupe de San Fernando Valley (CA) n’avait pas pris autant de temps pour revenir chatouiller les oreilles et les consciences. Après un retour fracassant de la paire Graffin/Gurewitz en 2002 (les ‘Evil Twins’, comme il est crédité dans le livret), le DVD Live At The Palladium sorti l’an passé (2006) était venu affirmer à la face des plus sceptiques qu’avec ses plus de 40 ans de moyenne d’âge, Bad Religion était toujours aussi prompt à défendre ses valeurs et ce son à nul autre pareil…

Chronique :

Même producteur (Joe Barresi), même thème graphique noir, rouge et blanc, artwork signé à nouveau par Nicholas Pritchard (studio metro/sea, responsable design attitré d’Epitaph) : New Maps Of Hell poursuit, par certains aspects, l’évolution logique du groupe. Quelques indices cependant, laissent présager du semblant de « démon de midi » qui a apparemment présider à l’écriture de ce 13ème album (le ‘crossbuster’ plaqué sur le CD, logo du tout premier disque du groupe, aura déjà fait tiquer !). « Mettre tout à fond et revenir à des morceaux pas entendus depuis Stranger Than Fiction », voilà l’impression que laisse d’emblée le début d’écoute de New Maps Of Hell.

Guitares qui grésillent, voix agressive, un Wackerman qui pilonne comme jamais (« Germs Of Perfection »), une basse hypertendue (« New Dark Ages »), l’intensité est au rendez-vous en ce début de disque. Un album évolutif qui débute en trombe comme son prédécesseur et qui va crescendo jusqu’au milieu de tracklist, mû par une certaine logique dans l’agencement des titres pour faire naviguer l’auditeur entre sonorités oldschool et un son punk rock plus lumineux et libéré.
« Dearly Beloved » et ses relents d’« Infected », la furia à l’ancienne de « Murder », l’hymne anti-monoculture de « Grains Of Wrath » qu’on aurait bien vu sur The Process Of Belief… Entre le début du disque et 38 minutes plus tard, les tons de « Heroes & Martyrs » et de « Fields Of Mars » sont ainsi aux antipodes l’un de l’autre. Les ambiances, les tempos (l’album est plutôt très rapide), la prod inégale, tout est fait pour donner une identité à chaque titre jusqu’à pousser le son dans des retranchements parfois contestables (certaines transitions dans les niveaux de compressions, ces chœurs oozin’ aahs de toute beauté mais omniprésents, parfois par-dessus le chant lead).

Contestable aussi, le choix d’ « Honest Goodbye » comme single, là où dans le genre « chanson de Bad Religion émotionnelle et mid-tempo », « Lost Pilgrim » se révèle bien plus prenante (mélodie, chœur, solo imparables…) prise isolément. Un single (inspiré selon Gurewitz de l’œuvre glaçante de T. Capote, « De Sang Froid ») qui prend pourtant une toute autre dimension niché au sein de l’album, après la poignante et fédératrice « Before You Die » (« As you ruminate the hopeless sands of time, do you wonder how your life has been defined ? So think ! Think before you die »). Après surtout un début de disque au champ sémantique très noir. « Heroes & Martyrs », « Requiem For Dissent », « New Dark Ages » : « These are the new dark ages » clame Graffin à cette humanité aveugle, troupeau gavé de certitudes, inaccessible à des vérités qu’il est bien plus confortable d’ignorer.

La tonalité générale des textes est d’ailleurs globalement du même acabit sur ce disque moins contestataire et plus désabusé, privilégiant un certain idéalisme faussement naïf derrière lequel se protéger, œillères trouées de celui qui sait mais continue à rêver d’un ailleurs en restant conscient du monde et de ses horreurs (« It seems like a lifetime of scrutiny »…). Une dérive du débat ‘point de vue contre point de vue’, qui a coupé le Monde en deux, thème porté par le morceau « Heroes & Martyrs » (« Two points of view », « Both poet and thrall », « Tell me which deity you’re praying to »…). L’état d’esprit du groupe semble avoir évolué, s’adaptant tel un négatif (noir et blanc) à l’image d’une Amérique au climat de pensée en pleine dépression, où religiosité et paranoïa post-traumatique, sont venues combler l’effondrement (quel symbole) d’un statut d’intouchable gendarme planétaire. On comprend alors d’autant mieux le visuel, entre ruines et reconstructions érectiles, drapeau patriote en tête, qui garnit parmi les tâches rouge sang, la pochette du disque. L’Irak et l’Axe du Mal, les New Maps Of Hell, prochain terrain de jeu où laver l’affront dans une catharsis égotique à en vomir, où en perdre espoir… La fin du disque change d’ailleurs complètement de vocabulaire avec des morceaux aux titres évocateurs comme « The Grand Delusion », « Lost Pilgrim », « Submission Complete » (qui fait penser aux expérimentations de « The Defense » sur TPOB)…

L’album achevé, l’impression de vitalité du groupe impressionne vraiment, faisant de New Maps Of Hell un des sommets de la carrière de Bad Religion en matière de songwriting. Un album fort, puissant et mélodique, où le combo californien continue son évolution musicale relative, tout en conservant son statut de groupe intelligent et mûr. Le retour aux sources mêlé au bagage plus récent (cet opus aurait dû s’intituler ’Stranger Than Belief’ !), donne comme à chaque nouvel album des morceaux mémorables tels « Scrutiny », évitant ici les redites tout en perpétuant un son et une attitude on l’espère encore pour longtemps.

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