nov.
9
2008
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Sainte Catherines (The) >> The Soda Machine |
Contexte :
Le 26 juillet 2006 The Sainte Catherines fêtaient comme il se doit à Montréal leur 500eme show, laissant entendre les jours précédents la fête que des caméras traineraient dans le pit. A partir de là les théories les plus folles pouvaient librement être échafaudées. La plus ambitieuse mais surtout la plus attendue voulant que le groupe nous gratifie d’un DVD live de ce fameux 500eme. De quoi perturber le sommeil de plus d’un fan en attente de l’annonce fatidique. Cependant rien ne vint, une année passa, la moitié d’une autre et puis… Et puis enfin la sortie d’un CD/DVD fut planifiée pour la fin avril 2008, non pas chez le gros Michel mais chez Indica Records, label montréalais pour le moins hétéroclite et cherchant plus dans le rock que dans le punk. Un choix peut-être particulier, voire étrange pour certains, mais qui ne devrait pas nous détourner de la vraie question : au fait que contient vraiment cet album ?
Chronique :
Rompant quelques mois avant son échéance la trêve d’un an que le groupe s’était imposée à la fin de l’été 2007, les St4 annoncent leur retour. Est-ce le live tant attendu dans un doublet Cd/DVD ? Ou bien un nouvel album chargé de bonus vidéo en tout genre ? A moins que ce ne soit un live filmé accompagnant un nouvel album ?
Et oui que de théories farfelues et improbables pour certaines, émergeant dans les esprits les plus fous des fans les plus alcoolisés. Un suspense insoutenable qui sera rompu quelques semaines avant la sortie de ce nouvel opus, attention roulement de tambour !
Et là première déception : The Soda Machine n’est pas un live… et pas non plus un album. Là vous êtes bien feintés comme dirait l’autre. Car The Soda Machine regroupe en fait un documentaire d’une bonne heure et demie sur le groupe depuis ses origines en 1999 jusqu’à ce fameux 500eme show en 2006, ainsi qu’un CD compilant B-sides, raretés et autres, soit 25 titres à s’enfiler dans le gosier.
Ceci étant dit, passons aux choses sérieuses, en commença par la galette audio. Un skeud qui ravira les non possesseurs de platine vinyle puisqu’ils trouveront là, les trois titres parus sur le split réalisé avec Whiskey Sunday ainsi que les deux autres issus de celui avec Fifth Hour Hero.
On aurait pu également penser que l’EP The Machine Gets Underway serait fourni dans son intégralité mais ce n’est pas tout à fait vrai. Ainsi, seuls « You Smell Like Greed Dirty Bastard » et « Fuck G-20, GoV-8 ! » sont effectivement tiré de cet EP. Les autres titres, bien que présents sur sa tracklist, sont en fait tirés d’autres productions du groupe. « You Shall Rise Again From Your Own Ashes » (qui au passage a absorbée« Sarcastic Euphemism » qui lui servait d’intro) est donc issue d’une démo intitulée School, Job, Dancing, au même titre que « October 4th : The International Day Of Lies » et « There’s Shit In Your Veggie Dog ». Ces deux titres bénéficiant par ailleurs sur ce CD d’une seconde version, provenant de la session d’enregistrement du split avec Whiskey Sunday (seul « There’s Shit In Your Veggie Dog » se retrouve effectivement sur ce split). De quoi reconstituer artificiellement le premier EP du groupe, ou presque puisque l’instrumentale « Car Wash And Telemarketing » est quand même aux abonnées absentes.
Toujours dans le registre des titres tirés d’anciennes productions du groupe, on finira le CD par « Powerless Power » et « Bright Stars », deux morceaux présents sur le premier album : Those Stars Are For You.
Mis à part ces morceaux piochés dans les archives du groupe on va également fouiner du côté des compilations auxquelles les québécois ont participé… qu’elles aient vu le jour ou non. C’est le cas pour cette version édulcorée de « Burn Guelph Burn » ainsi que pour l’acoustique « The Unforgiven 3 (Best Song Ever) ». Compilation toujours, mais ayant cette fois-ci abouti, avec deux reprises : la très bonne « Sweetnes Kills » de Penny Opera et l’excellente « Sour Grapes » des non moins excellents Leatherface (son riff inoubliable servi sur un tempo plus lent que l’original mais finalement aussi savoureux).
Du côté des b-sides, elles sont tirées en très majeure partie de Dancing For Decadence puisque outre la « October 4th : The International Day Of Lies » citée ci-dessus, ainsi qu’une « Drinking Antifreeze For Fun » issue de la session de The Machine Gets Underway, les quatre chansons restantes ont été enregistrée à l’occasion des sessions du dernier album du groupe. Quatre tunes pouvant se révéler terriblement accrocheuses comme « Still Not Getting Any… Credibility » ou encore « Theme Song For Another Brown Tuesday » qui se la joue fondant au chocolat avec un petit côté pop sous la couche hardcore, pas désagréable pour un sou.
Un peu plus difficile de se prononcer à l’abordage de « My Ass Is On Fuego, What About Yours ? », la faute à la qualité démo donnant un rendu quelque peu screamo à l’ensemble. Enfin on tombera sur quelque chose de purement hardcore avec… « Hardcore Is Stupid », un morceau plus hargneux et brutal que la norme des titres des St4 et qui d’ailleurs se verra évincer pour cette raison. Hugo n’est pas un fan de hardcore, comme il le dit dans le livret « I think hardcore is pretty stupid actually ».
Le livret, puisqu’on en parle, bénéficie d’un traitement graphique bien soigné dans la lignée de l’artwork, ainsi que de son lot d’explications de paroles en majorités fournies par Hugo. Un supplément texte d’autant plus indispensable pour ce genre d’exercice qu’il permet notamment de saisir le pourquoi et le comment de l’éviction de certains morceaux de tel ou tel album. Dommage que, contrairement aux précédents efforts du groupe, le livret ne bénéficie pas d’une double version français/anglais.
Pour ce qui est du DVD rassurez-vous, il y aura bien un choix dans la langue et même plus d’un puisque trois possibilités s’offrent à nous : une version française, une anglaise et… une « V.O. ». En effet, les différents intervenants présents sur le documentaire s’exprimant aussi bien en anglais qu’en français (à fort accent), cette dernière version est à prendre dans le sens « sans sous-titres », les deux autres offrant, bien entendu, une traduction dans leur langue respective.
Je ne m’attarderais pas sur la section « Music Video » qui, comme son nom l’indique, vous permettra de visionner les clips du groupe (pour les trois quarts assez récents puisque la seule video d’un titre non tiré de Dancing For Decadence est celle de « Va Donc Chier »). Passons immédiatement au gros du dvd : le documentaire.
« Ya des groupes qui vont passer je ne sais pas combien de semaines en studio pour sortir un album qui sonne impecc’, mais pendant que les autres sont je ne sais pas combien de semaines en studio, les st4 sont je ne sais pas combien de semaines sur la route. » Lâchée dans les premières minutes du docu, la phrase plante tout de suite le décor. Car depuis leurs débuts, jusqu’à leur arrivée chez Fat Wreck, les canadiens n’ont pas cessé de prendre la route… pour le plus grand plaisir des garagistes : les pannes de leur van (survenant de préférence au milieu de nulle part juste avant un gros fest en Floride) étant sans doute l’événement le plus récurrent dans la vie du groupe, ça et les changements continuels de line-up.
Car l’histoire des St4 est loin d’être tirée en ligne droite, et ce film est là pour en témoigner, retraçant l’histoire du groupe de Concrete Fongus jusqu’au fameux 500ème concert en juillet 2006, le tout à travers les témoignages des membres (anciens ou actuels) mais également de journalistes, fans, amis et autres groupes parmi lesquels on comptera Fifth Hour Hero, The Lawrence Arms, Against Me ! sans oublier les gérants de labels tels qu’Eli Bissonnette de Dare To Care et bien entendu le tonton Mike.
Que du beau monde donc pour nous peindre une aventure haute en couleur mais surtout franchement casse gueule ou comment un groupe haï à ses débuts s’est progressivement imposé sur la scène. Comment ? En foutant les mains dans le cambouis ! Une transmission qui pète ? Pas de quoi arrêter la tournée, et tant pis si les réparations coutent plus chères que ce qu’ont rapporté les derniers shows. Une date à l’autre bout du Québec pour jouer devant trois pelos ? Le groupe est déjà en route ! La même chose en Californie ? Sans problème. Il fait - 40°C ce soir, on dort où ? Dans le van, pourquoi !?
Autant de récits et autres anecdotes distillés au cours des interviews et parfois renforcés par des vidéos d’archives, qui permettent de saisir peu à peu l’état d’esprit du groupe dont la démarche peut belle et bien être qualifiée de D.I.Y. Un mode de vie qui colle tellement à la peau de la bande que ces histoires sont contées de manière extrêmement naturelle au point qu’elles nous apparaissent comme l’évidence même. Cela dit combien de groupes seraient prêts ou même réussiraient à franchir autant d’épreuves sans « appeler leurs parents pour payer les réparations afin de rentrer à la maison », comme le dit un journaliste ?
Une parcours qui aura créé une profonde admiration envers le groupe ou du moins pour les plus réservés, un profond respect. Quant à ceux qui pensent que depuis leur arrivée sur Fat Wreck, The Sainte Catherines se la coulent douce et ont cédé à l’attitude « rockstar », ils se trompent grandement. Il faut voir en effet Hugo nous raconter qu’il devait taxer des clopes à tout le monde parce qu’il n’avait que 5€ en poche durant une tournée européenne, ou encore le groupe s’extasier lorsqu’il peut passer une nuit à l’hôtel, pour comprendre qu’on est à des centaines des bornes des clichés véhiculés par la musique mainstream. Après tout comme le dirait Hugo : « Être indépendant et être underground, c’est pas une étape pour passer à autre chose, c’est une décision, c’est un choix qu’on fait ».
Enfin, pour les plus déçus de ne pas avoir affaire à un live, sachez que le documentaire contient tout de même quelques morceaux issus du fameux 500eme concert, histoire de foutre le bordel dans votre salon, la cerise sur le gâteau en quelque sorte.
Un combo cd/dvd qui permettra de comprendre au mieux l’admiration suscitée par les Sainte Catherines. Une émotion résumée au mieux par une citation d’un de leur fan : « J’aimerais mieux avoir leurs paroles tatouées sur mon corps que des images ou des dessins ». Tout est dit.
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