mars
22
2011
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Sainte Catherines (The) >> Fire Works |
Contexte :
2006 et la sortie de Dancing For Decadence dans l’écurie renommée de Fat Mike fut un événement de taille pour les Sainte Catherines qui se voyaient alors mis en pleine lumière sur la scène punk internationale. Aussi pouvait-on s’attendre à une certaine accélération de leur carrière, pourtant il n’en fut rien. Et si le groupe était de retour dans les bacs 2 ans plus tard, ce n’était pas pour un nouvel album mais une compilation de titres issus de splits, EPs et autres raretés doublés d’un très bon documentaire, le tout non pas sur Fat Wreck, mais chez Indica Records. Ceci fait, ce fut le silence radio, une pause pour se concentrer sur Yesterday’s Ring, side-project folk/country dans lequel officie la majeure partie des membres du groupe. Et puis en 2010 voilà que les québécois refont parler d’eux, et pour un album qui plus est ! De quoi en réjouir plus d’un. Album qui verra le jour en France chez Guerilla Asso, quant à l’international pas de gros Mike puisque la galette sort chez Anchorless Records, un label au catalogue pour le moins hétéroclite puisque s’y côtoient, entre autres, des groupes de hardcore et des punks s’abandonnant pour un temps à la gratte sèche...
Chronique :
Quatre ans donc que les québécois n’ont pas sorti de nouvel album. Et pourtant l’attente ne fut pas si longue. Peut-être parce que ces quatre années furent comblées par une recherche presque boulimique des moindres productions du groupe. Car oui les Sainte Catherines ont définitivement marqué mon esprit, et de la meilleure manière. Pourtant ce fut presque par hasard que j’ai découvert le groupe au détour du sampler iFloyd de Fat Wreck. Mais dès la première écoute de « I’d Rather Be A Part Of The Dying Bungee Scene » quelque chose venait de changer : sans aucun doute le coup de foudre musical. A partir de là je n’avais plus, cet été là, que les St4 dans la tête… et à la bouche au point d’en saouler – plus que la bière ne l’avait fait pour moi – tous les amis ce fameux soir de la fête de la musique. Depuis la plupart ne m’adresse plus la parole, mais peu importe car Dancing For Decadence, lui, me fait toujours le même effet.
Et puis il y eut aussi « Broken Cigarette », découvert à travers les hasards du net. Un des premiers titres du groupe qui déjà possédait cette force, cette évidence et cette sincérité. Un morceau qui ne prit véritablement sens que quelques semaines plus tard lorsque je me suis retrouvé à errer dans les rues déserte à 5h du mat, finissant ainsi une soirée passée à devoir supporter le copain de la fille qui ne me sortait pas de la tête. La regarder mais ne rien pouvoir faire, encaisser ses conneries à lui sans broncher, et s’énerver en silence, au point d’en perdre l’envie de boire. Il n’y avait pas de sommeil possible après cela, juste des rues à parcourir et nulle part ou aller, mais aussi un vieux pote pour tenir compagnie… et puis la pluie. Je ne sais plus combien de temps nous avons discuté, de tout mais surtout de rien, abrités sous les arbres en attendant qu’elle passe, putain de nuit. Mais à la fin nous riions à nouveau, et je n’aurais échangé cette soirée pour rien au monde.
Pourquoi raconter tout ça ? Tout d’abord parce que je suis payé au mot (tout comme Arsene Wenger sur la première chaine sauf que ces tarifs sont tellement élevés qu’ils ne peuvent même pas acheter une phrase entière). Ensuite pour montrer à quel point le groupe a eu une influence sur moi et a marqué ma vie (et encore il ne s’agit là que d’un échantillon, je n’ai pas parlé de « It’s All About Ja Rule Baby »... ni de toutes les autres…), et par conséquent à quel point il me sera difficile d’aborder cette nouvelle galette avec une objectivité à toute épreuve.
Car oui, comme certains pouvaient s’en douter, ce changement de label n’est pas aussi anodin qu’il y parait, et trouve en partie ses racines dans le contenu de l’album. Déjà, à l’écoute de « We Used To Be In Love » quelques semaines avant la sortie de Fire Works un gros doute émergea : comme si le groupe avait oublié d’y injecter cette bonne dose de fougue, cette énergie qui faisait vibrer les guitares, cette petite pilule bleue animant la batterie aussi surement qu’elle fait battre le cœur d’un sexagénaire, ce coup de peps baigné dans l’alcool qui faisait gueuler de toute part des bouches au sourire figé à la bière. Bref de quoi élever ce bon titre au rang d’une tuerie digne de leur précédent album.
Un doute confirmé par la découverte de l’album tant attendu dont la toute première écoute me laissa dans la perplexité, faisant croire à un incident lors de son passage de frontière, comme si la particule « punk » avait été retenue en douane, ne laissant que sa sœurette « rock » parvenir jusqu’à nos oreilles. Quant au « hardcore » ? Disparu, dérobé lors du transport et ne comptez pas sur l’enquête pour le retrouver : du travail de pro.
Le paroxysme de cette incrédulité se voyant atteint lors de l’intro à l’harmonica de « Back To The Basement That I Love » sur laquelle on en vient à se lever pour vérifier que l’on n’a pas glissé par erreur un disque de Yesterday’s Ring dans le lecteur. Voilà le nom est lancé. Après tout, avec plusieurs années passées sur le side-project folk/country, il serait plutôt normal que celui-ci en vienne à déteindre sur son grand frère. Alors oui par certains aspects, notamment un côté plus intimiste, aussi bien sur le jeu que sur les paroles, on se laisse parfois à penser à une sorte de Yesterday’s Ring version électrique.
En y repensant bien, on peut même se demander si ce son est vraiment si nouveau que ça pour le groupe. En effet, avant de devenir une figure de la scène avec The Art Of Arrogance et surtout Dancing For Decadence, les Sainte Catherines faisaient preuve d’un jeu plus mélodique et légèrement moins testostéroné comme en témoigne l’excellent EP The Machine Gets Under Way. Retour aux sources alors ? En partie peut-être (n’est ce pas le sujet de « Back To The Basement That I Love » ?). Mais difficile de se contenter à 100% de cette explication, car tout aussi teintés de mélodies les premiers titres des québécois, ils n’en possédaient néanmoins pas cette rugosité et cette tournure punk qui semble diluée et lissée dans ce nouvel opus pour un résultat au rendu plus « mainstream » (du moins sur une partie des titres).
Malgré cela le groupe réussit tout de même à charmer et, passé la surprise et les regrets, on se laisse peu à peu amadouer par les différents titres de l’album, « D’You Guys Wanna Fuckin’ Party After This ? No. » en tête. Peut-être parce que c’est le morceau rappelant le plus le passé du groupe, peut-être est-ce simplement parce qu’il sait se faire entrainant… ça et son sing-along qui, à coup sûr, fera l’unanimité en concert. Peu de doute également sur celui de « Headliners Don’t Load (But They Kill Cops) », lui aussi un des titres les plus punchy et entrainants de l’album.
Les morceaux plus posés tirent aussi leur épingle du jeu comme le montre le dépouillé mais prenant « No Friends », au texte dont il sera difficile de se détacher. Les paroles, un des grands atouts du groupe, qui se trouve ici conservé. Ainsi, même si on ne retrouve pas les hymnes débridés et ravageurs nous prenant à la gorge au point de vouloir les hurler à tout prix jusqu’au bout de la nuit, il y a toujours dans ces textes une tournure, une phrase, une histoire, pour résonner en moi comme quelque chose de connu et personnel, et dont on arrive plus à se passer...
Fire Works devrait ravir les amateurs d’un punk aux accents rock prononcés et autre pop punk le tout légèrement rehaussé par un chant rauque à souhait. Sans oublier ceux qui trouvaient que les St4 étaient trop costauds pour eux. Un album dont les titres parviennent à faire leur chemin dans la tête… du moins jusqu’à qu’on remette Dancing For Decadence sur la platine.
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