Burning Heads

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Lors de leur passage à Lorient pendant la tournée effectuée avec Uncommonmenfrommars, les Burning Heads nous ont acordé un long entretien. Thomas (batterie), JYB (basse) et Mikis (guitare) mais aussi Trint (guitare-Unco) répondent à une première série de questions.

Quarante dates sur les cinquante prévues ont déjà été faites, c’est l’occasion de faire un premier bilan. Comment ça se passe jusqu’à présent ?

JYB : Carrément bien, ça se passe vraiment bien.

Trint : C’est une chance. Une entente, une harmonie s’est installée dans le bus. En tous cas, je sais pas pour vous, mais pour nous ça va au delà de nos espérances. On pensait que ça serait cool mais pas aussi cool que ça.

JYB : Ça se passe sans tension, du début à la fin. C’est agréable de regarder les Unco tous les soirs et je pense que c’est pareil pour vous ?

Trint : Ouais, c’est clair.

JYB : On se donne la main, on fait des rondes, on fait des missions communes.

Vous avez fait plusieurs tournées communes (ndr : le Punky Rock Tour avec Tagada Jones et Les Vulgaires Machins en 2003, le Punky Reggae Tour avec NRA et High Tone en 2001), qu’est ce qui vous attire dans ce genre de plans ?

JYB : On s’est retrouvé il n’y a pas si longtemps que ça sur des dates alors qu’avant on ne faisait que se croiser. On se connaissait juste par le biais d’interviews et de "on dit que" et "il paraît que". En se retrouvant, on s’est rendu compte qu’on se ressemblait sur pas mal de points. Et depuis peu de temps, on a le même tourneur qui nous a proposés une tournée "à l’ancienne" de soixante dates pour soixante concerts et on accepté.

Mikis : Quand on part en tournée avec d’autres groupes que l’on aime bien, il y a une sorte d’émulation qui se créée, une motivation collective à faire ce qu’on fait. En tous cas, c’est comme ça que moi je le ressens et ça donne vachement plus de pêche. Ça permet aussi de découvrir les gens pleinement au quotidien car c’est un peu la vie de caserne pendant un mois et demi.

JYB : Ouais et puis au lieu d’être cinq ou six à être motivés à faire un concert tous les soirs, là on est quatorze.

Mikis : Ça permet aussi d’avoir des avis différents sur notre musique, de donner son avis sur celle des autres, de partager, de critiquer, d’échanger… C’est vachement constructif.

Vous n’êtes pas partis complètement à l’aventure non plus car vous aviez déjà pu faire un peu plus connaissance lors de l’enregistrement du split Incredible Rock Machine ?

JYB : Carrément, c’était déjà une bonne approche d’être tous ensemble dans le même studio pendant une dizaine de jours. Ça laissait présager que du bon.

Thomas (qui vient de regagner les loges après les balances) : C’était un premier pas, mais c’est pas pareil de se croiser pendant une semaine et être ensemble comme là sur la tournée. Tous les jours, 24 heures sur 24, on est tous les uns avec les autres, du bus aux loges et des loges au bus.

Incredible Rock Machine qui sert donc de "prétexte" à cette tournée est le troisième split (ndr : Cross The Bridge avec les Vulgaires Machins, BHASS avec Alif Sound System et donc celui avec Unco). Pourquoi en faire autant et en si peu de temps ?

Mikis : Les rencontres, les copains, la vie, les bons moments…

JYB : Les groupes qui nous font des propositions de split car ça ne se fait pas tout seul, les possibilités pour avoir un studio, pour sortir l’album.

Thomas : Mais à la base, il y a toujours une rencontre, un bon moment qui fait que l’on se dit que si toutes les conditions s’y prêtent, c’est toujours bien de marquer ça de manière un peu plus formelle sur un disque et ce disque nous amènera à partir en tournée.

Parlons maintenant de Bad Time For Human Kind, sorti sur votre propre structure, Opposite Records. Après les déboires rencontrés avec Yelen mais aussi Epitaph et Victory, vous n’aviez plus envie d’avoir à faire un label, quelque soit sa taille ?

JYB : On a regardé à droite et à gauche les différents labels susceptibles de nous intéresser et on leur a demandé de nous faire des propositions. Et en fait on s’est rendu compte qu’on avait autour de nous la possibilité de tout faire par nous-mêmes et que l’on connaissait suffisamment tous les rouages, de la production du disque à la distribution. On a eu donc eu la chance de pouvoir y aller à ce moment là. On a trouvé un distributeur capable de distribuer notre propre production et un gars qui nous fait la promotion de manière indépendante. Et il s’avère que ce sont deux personnes qui ont travaillé sur le premier album des Burning et qui se retrouve encore à travailler avec nous. La boucle n’est pas encore bouclée mais c’est marrant de voir comment la roue tourne en retravaillant avec les mêmes personnes qu’aux débuts.

Retirez-vous quand même quelque chose de positif de ces expériences ?

Thomas : Chaque expérience même négative est toujours positive après. Les Unco ont appelé leur dernier album "Les cicatrices sont des pense-bêtes". Ça te permet de connaître les situations éventuels de clash et donc d’aborder ces différents sujets en premier lors d’un changement de label. Comme on dit, un homme averti en vaut deux, la première fois tu te prends le truc en pleine gueule, la deuxième tu essayes de passer à côté. Il y a toujours du bon, c’est une évolution de vie, avec toutes les erreurs que l’on a pu faire. Sachant que l’on n’a jamais aimé être encadré et dirigé, tu fonces un peu tête baissée comme un jeune couillon puis au fur et à mesure, quand tu t’aperçois que toutes les directions dans lesquelles tu as foncées tête baisée n’était pas les bonnes, tu orientes ton truc un peu différemment. Mais on en garde que du bon car on ne s’est jamais retrouvé pieds et poings liés avec un label pour la vie, jamais on s’est retrouvé avec des choses horribles à faire…

JYB : … ou avec des directeurs artistiques qui te disent de faire ça comme ça. On a toujours fait comme on voulait, de la façon dont on le voulait.

Mikis : Epitaph a quand même apporté une exposition européenne au groupe qui était intéressant je pense. Exposition qui a un peu disparu avec Yelen après malheureusement car ils bossaient moins sur l’export vers l’Europe. C’est un peu dommage. C’était une super expérience humaine avec Yelen. Les autres connaissaient Patricia (ndr : Patricia Bonnetaud, ancienne directrice artistique de Yelen) depuis un moment déjà et c’était agréable de travailler avec quelqu’un d’aussi passionnée.

Thomas : Et c’est ça qui a fait que notre expérience dans une grosse major company n’a pas été l’expérience la plus douloureuse que l’on ait eu de toute notre carrière. Cette personne était le parfait tampon entre la rigueur imposée par une grosse maison de disques et le côté parfois un peu chaotique que les Burning aiment bien.Le seul truc qu’on aimerait dans l’idéal serait d’avoir suffisamment d’argent pour racheter tous les droits de tous nos disques. Pour l’instant, on en a quelques-uns mais on n’arrive pas à les sortir car on n’a pas assez d’argent pour le faire. Il nous manque juste les deux chez PIAS (ndr : Dive et Super Modern World) et les deux chez Epitaph (ndr : Be One With The Flames et Escape). Dans l’idéal, on aimerait bien les racheter pour pouvoir les proposer l’intégrale des Burning sous l’étiquette Opposite, au stand ou en VPC.

Beaucoup disent que Bad Time For Human Kind représente un retour aux sources au niveau des compos (y compris le retour du reggae-dub). Est-ce que tu le ressens comme ça et comment est venue cette envie de faire quelque chose de plus direct, de plus brut ?

Thomas : Ben écoutes, ce n’était pas une envie, ce n’était pas un projet, c’était rien du tout au départ.

JYB : Pour moi l’album le plus direct et le plus brut que l’on est fait c’est Escape. Vu comme ça, ce sont des sources qui ne sont pas si vieilles que ça.

Thomas : Mais si tu parles d’un retour à la haine et à la rage qui s’entend dans les morceaux, c’est pareil. On ne s’est pas levé un matin en disant "allez, aujourd’hui on va dans le local pour composer des nouveaux morceaux avec un sac à dos rempli de haine". On n’a pas du tout fait ça. C’est lorsque l’on a écouté tout ce que l’on avait pondu, c’est-à-dire les ambiances que dégageait la musique et les paroles, on est tous arrivés à ce constat : on était inspirés mais pas de manière très positive, tout sonne un peu sombre, un peu glauque. C’est une constatation que l’on a fait une fois que le travail était terminé, que l’on avait fait tous nos petits trucs. On en est arrivé à la conclusion que sachant que l’on est tous des éponges, perméables à toutes les vibrations du monde qui nous entoure, on doit être dans une époque un peu merdique car tout ce que l’on avait envie de faire tirait vers le sombre, pas vers le positif.

JYB : Tu me rassure, j’ai cru que t’allais dire qu’on avait fait de la merde. (rires)

Thomas : Mais c’est vrai, peut-être que c’est l’époque qui veut qu’il y ait plus de rage dans nos morceaux. Mais on ne s’est pas dit que le temps était aux morceaux rageurs donc rageons tous en chœur. L’arrivée de Mikis y est peut-être aussi pour quelques chose, parce que Mikis a une oreille à la fois externe et interne (ndr : il a été roadie avant de passer sur scène).

JYB : Tout comme l’arrivée de Fonfon était pour quelque chose dans Taranto.

Le fait d’être en auto-prod et d’enregistrer l’album en trois jours n’a rien changé non plus ?

Thomas : On a travaillé les morceaux pendant super longtemps, on s’est accordé des temps de répit pour écouter ce que l’on avait fait. Et un jour, on a décidé de mettre tout ça sur bande, d’une manière propre et à peu près bien jouée. Effectivement, ça nous a pris trois jours mais le travail en amont avait duré vachement longtemps. Enfin trois jours pour les premières prises, avant de rajouter les guitares et les voix.C’est vrai que l’on n’a pas eu les mêmes moyens pour travailler que dans un grand studio mais sachant que l’on faisait tout nous-mêmes, il n’y avait pas d’ultimatum. Le seul ultimatum que l’on avait était que le disque sorte avant la tournée. Quand tu es dans un studio que tu as réservé pendant une semaine, du lundi au lundi, il faut que tout soit fini le dimanche soir. En enregistrant chez nous, on a pu revenir sur certains trucs, prendre plus de temps.

Toujours sur Bad Time…, il y a pas mal de titres qui parlent d’une certaine léthargie de la jeunesse française…

Thomas : Et on s’est trompé et on est bien content de s’être trompé. On pensait que la jeunesse était complètement lobotomisée, abreuvée de MacDo, de Coca, de TF1 et de Star Academy qu’elle n’aurait pas la force de bouger même si on lui foutait des bâtons dans les roues. On en venait à regretter l’époque de mai 1968 qui a vu les étudiants se rebellés puis les classes laborieuses qui ont suivi le mouvement…

JYB : Mais c’est pas vraiment la même forme de rébellion non plus.

Thomas : Mais en 1968, se sont quand même les étudiants qui se sont mobilisés au départ car ils sentaient que leur avenir était un peu incertain. Ils voulaient exiger l’impossible alors qu’aujourd’hui ce qui est possible, tu n’oses pas ou tu n’as même plus la force de le demander tellement tu es lobotomisé. Le domaine des rêves, des ambitions, des volontés et des aspirations s’est considérablement réduit depuis des années. Maintenant tu as juste envie de t’acheter ton nouveau lecteur DVD fabriqué en Chine, ce qui va foutre ton père au chômage car il bosse dans une entreprise qui fabrique des lecteurs DVD en France. Donc on se disait que la jeunesse française était mal barrée. Et puis avec le CPE, elle s’est réveillée et on est bien content d’avoir eu tort. Mais tout n’est pas gagné…

JYB : Un CPE de perdu, dix de retrouvés.

Thomas : Ouais, peut-être mais voir que les gens sont encore capable de descendre dans la rue et de crier qu’ils ne sont pas d’accord, c’est bien.

Depuis la fin de la "crise" du CPE, on assiste au retour des extrémistes de tous poils. Sarkozy remonte au créneau, Le Pen et De Villiers se réveillent. Est-ce que l’on a suffisamment retenu les leçons d’avril 2002 pour la prochaine présidentielle ?

Thomas : Je pense qu’on a un peu tous tendance à oublier très rapidement et à refaire les mêmes erreurs.

Mikis : Et puis c’est tellement facile de rejeter la faute sur l’autre, l’étranger par exemple.

Thomas : On se rend compte avec tous ces crétins des sérieuses faiblesses de la démocratie. Si c’est une démocratie à la Sarkozy ou autres, ça ressemblerait plus à une démocratie fasciste, ce qui ne serait pas vraiment le top. Ils sont tous là derrière, et se servent de tout ce qui a été mis en place au niveau des mécanismes politiques. Ils n’ont pas envie de lâcher l’affaire, même si les gens descendent dans la rue pour dire qu’ils ne sont pas contents. Eux ont entrevu et pensé des solutions pour nous tous qui ne sont sûrement pas les bonnes mais ça les arrange, ils continuent leur truc. Sous prétexte de démocratie, on se le fait mettre bien profond.

Après avoir évoqué l’actualité des Burning Heads (l’album Bad Time For Human Kind, le split Incredible Rock Machine et la tournée qui a suivi), on parle maintenant du passé et du futur du combo d’Orléans, toujours en compagnie de Thomas, JYB, Mikis, Trint et Pierre qui a rejoint le reste de la troupe.

Quel regard avez-vous sur votre carrière ?

Pierre : Aucun car on ne regarde jamais derrière mais toujours la prochaine date que l’on va faire. A partir du moment où tu regardes derrière toi, tu n’avances plus.

Thomas : Les seuls moments où l’on regarde derrière c’est quand on se souvient d’anecdotes pour faire rire les copains. On se souvient de ce qui nous a marqués en bien ou en mal mais au final, tu ne gardes que le côté positif de la chose. Même quand tu vas jouer dans le trou du cul du monde et que la salle est une piscine vide et que tu vas jouer au fond du grand bassin. C’était il y a longtemps mais on s’en souvient tous encore.

Pierre : Là où l’on prend conscience de ce que l’on a fait, c’est quand on regarde la liste de nos morceaux, et quant il faut choisir lesquels on va jouer le soir. On a fait huit albums, ce qui correspond à 120 ou 130 chansons et parfois ça devient cruel.

Thomas : Sur la tournée, on a 80% des morceaux qui seront joués tous les soirs, le reste évolue selon nos envies.

Pourtant vous êtes presque les derniers représentants d’une scène punk-rock française qui a vu le jour à la fin des années 80 avec Seven Hate et Portobello Bones…

Thomas : Et ouais, tu as trois dinosaures en face de toi (rires)

Trint : Pour l’anecdote, la première tournée d’Uncommonmen a eu lieu avec un concert avec Seven Hate à Nantes, suivi d’un concert avec les Burning à Saint-Etienne.

Thomas : A part ça, je n’ai pas encore l’impression d’être un vieux.

JYB : Ça nous fait toujours autant plaisir de remonter sur scène. Bon c’est vrai que ça fait chier car il y a de très bons groupes que l’on aimerait bien encore voir et c’est dommage qu’ils aient arrêté de jouer pour une raison X ou Y.

Pierre : Pour revenir à ce que disait Thomas, pour moi un vieux c’est un gars de 25 ans qui dit "j’écoutais du punk-rock quand j’avais 17 ans, maintenant j’en écoute plus, j’ai grandi donc je passe à autre chose".

Trint : Et en plus il ne rigole plus de ses pets (rires).

Thomas : Et vu que l’on fait toujours de la musique, que l’on écoute toujours du punk-rock, qu’on rit toujours de nos pets et ben on a toujours 17 ans. A un moment, on a considéré qu’il y avait des groupes qui étaient vachement en place et qui nous ont donné envie de jouer, maintenant il y a des groupes qui viennent nous voir en nous disant "vous êtes un groupe en place, vous nous avez donné envie de jouer". C’est bizarre car on n’a pas senti que l’on avait changé de camp, passer de ceux qui s’inspirent à ceux qui inspirent. Par rapport aux anciens groupes de notre génération, c’est vrai que l’on se sent un peu seul mais il y a toujours autant de groupes qui nous trouent le cul. Là on a la chance de faire cinquante dates avec les Unco et ça c’est une sacrée chance car tous les groupes que l’on rencontre sur la tournée aimeraient être à notre place.

Et c’est pour ça que vous insistez pour prendre, dès que l’occasion se présente, des petits groupes que vous appréciez en première partie ou de se lancer dans la production avec les Gravity Slaves et Trouble Every Day ?

Thomas : La prod ça vient du côté touche à tout de Pierre et si tu peux faire profiter de certaines de tes connaissances à quelqu’un, tu le fais. C’est le "Do It Yourself solidaire" en quelque sorte. Tout le monde ne peut pas tout faire soi-même, mais chacun peut faire profiter des expériences des autres.

JYB : Et puis il y a beaucoup de groupes qui n’ont pas la chance d’avoir les moyens de se payer des studios vachement bien pour leur premier album. Et il y en a d’autres qui n’ont rien du tout. Et dans ces cas-là, on peut essayer de leur rendre service.

Donc Opposite Records va évoluer avec les albums de Trouble Every Day et Gravity Slaves qui devraient sortir pour la rentrée 2006 ?

Thomas : Si les finances le permettent. On a la volonté de le faire, ce qui serait bien c’est que la structure Opposite puisse le faire avec ses épaules, sans être obligé de prendre de l’argent à droite ou à gauche. Si ça pouvait tourner tout seul, ça serait génial. Après on peut toujours apporter de l’eau au moulin pour permettre de survivre dans les moments difficiles.

Pierre : On voudrait proposer au stand de merchandising lors des concerts les productions Burning Heads mais aussi celles d’Opposite. On a mis un pied dedans donc on va continuer et je sortirai Trouble Every Day et Gravity Slaves sur Opposite.

La remise en cause du statut des intermittents du spectacle qui traîne depuis quelques années n’arrange peut-être pas les choses non plus pour les petits groupes ?

Pierre : On n’a pas fait de la musique pour être intermittent. Si on perd ce statut demain et bien je pense qu’on en aura bien profité. On trouvera autre chose mais ça ne nous empêchera pas de faire de la musique.

Thomas : Ça sera plus dur sans ce statut mais il s’est vraiment passé du temps avant que l’on puisse être intermittent grâce aux Burning. Pendant un moment, on était rien du tout, juste musiciens et pousseurs de caisses. Puis un jour, le cumul des cachets de musiciens et de pousseurs de caisses a fait que l’on a pu être intermittents.

JYB : Mais c’est vrai que c’est vraiment bien d’être intermittent car ça te permet de ne penser qu’à la musique.

Thomas : Je ne pense pas qu’on soit les mieux lotis mais par contre on bénéficie d’un luxe incroyable qui est de ne pas se dire "tiens, demain faut que je fasse de l’intérim sinon je finirai pas le mois" mais se dire "demain je vais aller répéter pour faire avancer le groupe".

Comparativement, c’est plus dur de trouver des plans de concert maintenant ou il y a dix ou quinze ans ?

Thomas : Ce n’est pas la même chose. Il y a dix / quinze ans tu pouvais trouver tout un circuit de bars. Maintenant tu trouves un circuit de salles institutionnalisées, dites pour les musiques actuelles et amplifiées. Sous ces grands termes, c’est vachement beau, ça brille comme un miroir de bordel mais certaines fois tu n’as pas toujours ta place. Et pour les petits groupes qui bénéficiaient de ce circuit de bars et qui pouvaient faire leurs armes sur ces petites scènes, c’est beaucoup plus dur. Heureusement pour nous, on a connu tout le réseau des bars qui nous a permis de nous faire les dents, sans compter les fanzines et tous les réseaux associatifs non institutionnels, on a plus de notoriété, plus de poids et donc accès à ces nouvelles salles.

Pierre : Comme dit Thomas, maintenant on a beaucoup de chance et on en profite un peu. Mais un groupe qui commence n’a pas cette chance et va presque au casse-pipe car c’est beaucoup plus dur qu’avant.

Mikis : Mais la plupart du temps, on préfère quand même jouer dans des bars que dans des salles institutionnelles.

Thomas : Et c’est pour ça que l’on a voulu inviter sur cette tournée, à chaque fois que c’était possible comme tu le disais tout à l’heure, des groupes qui n’auraient pas pu jouer à l’Astrolabe à Orléans ou à l’Elysée Montmartre ou dans d’autres salles qui auraient peut-être été trop grandes pour eux tous seuls. En les faisant jouer avec nous, on leur donne accès à ces salles-là et pour nous la soirée est plus belle car on est plus nombreux et aussi pour le public car ils peuvent voir des groupes de talent. Pour résumer, c’est se faire plaisir, faire plaisir à des amis et faire plaisir au public. C’est un échange de bons procédés et c’est ça qui est cool.

Alors que paradoxalement avec internet, chacun peut bénéficier d’une plus grande exposition ?

JYB : C’est pas forcément plus facile car c’est gigantesque internet, tu n’es qu’une petite goutte d’eau parmi un océan de données. Après c’est à celui qui est derrière son écran d’aller chercher ce qu’il veut.

Thomas : Mais avant tu avais toutes les données que tu voulais lire à la bibliothèque, fallait juste te sortir les doigts du cul pour y aller.

Pierre : C’est un outil, faut juste savoir s’en servir intelligemment et faire ce travail de recherche.

Thomas : Par contre, pour l’international du punk-rock, ce réseau internet est vraiment super efficace. Tu as toujours ce côté DIY mais avec des moyens internationaux. C’est pour pas mal de gens dans le punk une bouffée d’air frais et une opportunité pour être exposé un peu plus. Maintenant, peut-être qu’il n’y aura qu’une infime partie de la jeunesse qui ira à la pêche aux infos sur le net mais elles y sont et c’est ça qui est bien.

Pierre : Ça permet à un groupe comme nous de continuer à exister entre deux disques. Quand tu n’as plus d’actualité, un an et demi ou deux ans après la sortie de l’album, tu ne vas pas continuer à faire des magazines et des interviews car ça a déjà été fait. En 1994, 96, ou 98, quand on arrivait à la fin d’exploitation d’un disque par le label, le groupe était mort. Et plein de fois dans les fanzines, ça nous est arrivé de lire que le groupe avait splitté sous prétexte que l’on ne donnait plus d’actualité. Avec internet, tu peux aller vérifier en permanence sur le site du groupe s’il existe encore. S’il y a une actualité, c’est que le groupe est en vie. Ça nous a sauvé encore récemment.

Thomas : C’est encore plus valable à l’extérieur. Il suffit que deux années de suite tu aies la chance d’aller tourner en Italie ou en Espagne ou ailleurs, et que dans les deux années qui suivent tu tournes beaucoup en France ou tu bosses sur un nouvel album, tu ne donnes plus de nouvelles là-bas. En France, la rumeur circule, disant que tu es sur tel ou tel projet, à l’étranger, tu peux tout de suite disparaître car les gars se disent, on a eu les Burning deux ans de suite, ça fait deux ans qu’ils ne donnent plus de nouvelles, ils ont sûrement splitté. C’est un superbe atout car ça permet de dépasser les frontières.

Pierre : C’est un outil magnifique mais qui a aussi ses limites car avec un marteau, tu peux faire des saloperies ou construire des cathédrales.

La prochaine étape, c’est la sortie du DVD qui est en projet depuis un moment déjà ?

Thomas : En fait, la conception du DVD est divisée en deux chantiers bien distincts. Le premier c’est un concert, là c’est bon on a le son et l’image, c’est monté et mixé. Et puis il y a une partie historique, rétrospective, avec des documents d’archives, des interviews de gens ayant gravité autour du groupe. Et pour les mecs à qui on a confié le projet du DVD c’est un putain de boulot parce qu’ils ont dû visionner plein d’images pour en tirer un truc dynamique et intéressant.

Pierre : On leur a donné je sais pas combien de centaines de cassettes, donc il leur fallait au moins deux ans pour tout visionner. En plus de ça, ils ont rajouté des interviews qu’ils ont faites dans toute la France. C’est interminable mais le résultat devrait être pas mal. Le problème c’est que plus on avance dans le temps, plus on fait des concerts où des gars se pointent avec des caméras, donc on a encore plus d’images à rajouter.

Enfin, on a l’habitude de conclure les interviews par une question à la con. Est-ce une coïncidence si "Les aventures de Loïs et Clark" se sont arrêtées juste après la sortie de Super Modern World avec le grand-père chasseur qui tire sur Superman ?

Thomas : En fait on s’est aperçu que les super héros étaient pas toujours des mecs sympas, voire même parfois super-facho en fait (rires). Donc on était content de voir que le grand-père du petit garçon dézinguait Superman car ça fait un de moins. Le seul super héros qu’on puisse accueillir à nos concerts c’est le Vengeur Masqué (ndr : personnage récurent qui apparaissait sur scène lors de la tournée Incredible Rock Machine Tour) parce qu’il s’est mis en tête de remettre sur le droit chemin toute cette jeunesse qui était venu à un concert de punk-rock, mais on est bien content de voir que ses supers pouvoirs ne sont pas très efficaces car les gens reviennent aux concerts. On aime bien les supers héros un peu looser et le Vengeur Masqué est le roi des loosers.

Pierre : Et une fois sur deux il a une super grosse bitte…

Trint : Et l’autre fois des supers gros tatouages (rires).

Merci beaucoup les gars et bonne continuation.

“Merci à Nathalie @ Burning Heads”

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