Okploïde

Okploïde >> Miseria Espectacular

Contexte :

C’est à huit membres que reviennent en 2004 les palois d’Okploïde. Le nouvel album, leur second, intitulé Miseria Espectacular et composé de 17 titres, nous présente donc la bande avec sa section cuivre complète depuis l’arrivée de Yoann, Franck et Ramutxo.

Une nouvelle fois autoproduit avec les moyens du bord, l’album a été à enregistré pendant l’été 2004 à Pampelune, dans le pays basque espagnol. Ouais ok y’a plus désagréable pour l’inspiration ! Pour fêter la sortie de cette galette le groupe part en tournée pour la troisième fois outre-Atlantique où il a fait pas mal de bruit !

Chronique :

Avant de parler du fond attardons-nous deux minutes sur la forme. Car à examiner l’objet on a peine à croire au résultat d’un autofinancement. Le packaging et le livret sont hyper soignés, l’artwork noir et blanc qu’il plaise ou pas (ma copine aime pas... qui a dit : « elle a mauvais goût ! » ???), illustre à merveille le titre Miseria Espectacular : l’info spectacle, la souffrance et la misère en représentation tous les soirs au JT, "même heure, même chaîne" comme dit l’autre... Un gros empaffé au sourire acéré domine le monde, cigare aux lèvres, sa fumée épaisse rappelle le 11/09, les pantins qu’il tient en laisse s’agitent en bas : du gros ricain bible dans une main, fusil dans l’autre, aux cadavres d’affamés jonchant le sol, en passant par une caricature de femme obscène, à tête d’hamburger McDo, dont le ketchup sanglant souille un corps difforme. De son ventre sort un petit somalien aussi maigre qu’elle est écoeurante...

Tout ce que le monde comporte de malsain, d’urgent et de suffocant grouille dans cette esquisse, sorte de résumé pas très reluisant de l’humanité... Rien que pour l’oeuvre de Dod du studio de graphisme zookeeper.fr, ça vaut la peine d’acheter le cd plutôt que de le télécharger. Un effort de qualité que de nombreux groupes devraient suivre... Mais parlons un peu du contenu... Que ce soit clair : vous n’appréciez que le chant en anglais ? Au collège vous avez choisi l’allemand à cause d’un amour sans bornes pour les saucisses de Stuttgart et le port des chaussettes rayées dans les tongs l’été sur les plages du Pas-De-Calais ? Alors évitez cet album car le chant y est totalement en espagnol (plus un couplet en basque sur l’excellente "Guerra" et quelques phrases en anglais sur "Facil Girl"). Quant aux allergiques aux cuivres tentez donc tout de même l’expérience... En effet il faut bien préciser que si Okploïde présente une formation à 8 musiciens dont 3 cuivres, le groupe n’en est pas pour autant un de ces innombrables représentants du mouvement ska festif du sud-ouest. Mis à part sur la très fédératrice "Guerra", le gimmicks ska et les contre-temps de guitare sont quasi absents, le groupe serait plutôt à situer dans la mouvance punk rock puissant sur lequel viennent se greffer des phrases cuivrées qui enrichissent énormément l’aspect mélodique de leur style... "A la Mister Mc Fart ou Freygolo ?" Non, pas vraiment... D’abord Okploïde a son propre style et ensuite l’aspect réfléchi et plutôt engagé du combo les rapproche plus de Skunk avec un brin de Ska-P période Que Corra La Voz ! La bande se revendique d’ailleurs comme étant un mix de la Mano Negra et de Bad Religion ! ("Pitufos" par exemple).

Pour ceux qui connaissaient les vieux titres comme "Facil Girl" l’évolution du groupe est assez flagrante. Plus grand chose à voir, au niveau arrangements et prod c’est nettement plus pro et plus consistant... C’est nettement plus mature aussi au niveau des textes : l’histoire de la fille facile offrant "ses services" dans les backstages ça a beau sentir le vécu et être plutôt rigolo, ça n’égale pas le niveau des textes actuels de "Miseria Espectacular" ou "No Entiendo"... De nombreux sujets sérieux sont donc assez classiquement abordés comme la malbouffe, les sectes, la politique libérale, la police, mais Okploïde ne se prive pas de quelques moments plus festifs dans l’aspect musical de ces mêmes chansons (« Facha ») ou par des sujets plus légers comme sur "Vacaciones" ou "Barcelona"... Le chant espagnol privilégié a aussi un rendu excellent... C’est qu’on ne nous propose pas tous les jours un groupe de punk rock si bien chanté dans la langue de Don Quichotte ! A moins de s’intéresser de près à la scène punk espagnole (ce qui vaut le coup), l’aspect fraîcheur est donc ici garanti !

Malgré une vitesse d’exécution plutôt rapide, voire très rapide parfois, la superposition des cuivres se fait très bien, là encore, le résultat est irréprochable (« Secta »). A incorporer systématiquement des cuivres à des compos clairement punk rock mélo, le risque est souvent d’assujettir l’efficacité des chansons à l’impact plus ou moins réussi des phrases de trompette, trombone et autres sax... Heureusement ici non seulement l’équilibre entre les mélodies de chant, de chours (très travaillés) et de cuivres est réussi (« Historia ») mais en plus ces derniers,très présents, apportent indéniablement un plus de légèreté, d’entrain, de pèche et aèrent considérablement les compositions (« Sensacion »). Si on pense parfois à des références ricaines du punk mélo ou aux Voodoo Glow Skulls sur l’interlude « SMB » ou sur des boucles de cuivres dans « Perdida » par exemple, les influences sont parfaitement digérées et la maîtrise du groupe est réelle.

A noter en bonus la piste 17, instrumentale dans un premier temps genre ’outro’ carrément tripant, puis une deuxième partie assez prenante et surprenante : rap trip hop, rythmique drum n’bass, scratch, chant français, mélodie douce, transition vers un punk rock mid tempo très intéressant. le groupe démontre là encore une des nombreuses cordes qu’il a à son arc. On trouve aussi sur la partie Cd-Rom la piste vidéo filmée à Tijuana, ville frontière où des milliers de mexicains sont exploités par des multinationales américaines qui délocalisent à moindre frais (un sujet qu’ils abordent sur « Sin Frontera »). On découvre sur la vidéo la maison de leur pote Luis Guereña (rip, ex-chanteur de Tijuana No) à qui l’album est dédié, plutôt drôle malgré tout.

Mentionnons aussi la présence d’invités comme Marta et Iker (qui co-produit l’album) au chant sur la chanson éponyme de l’album. C’est d’ailleurs le père d’Iker, Alfredo (Guitariste de Barricada), qui effectue le super solo de guitare sur cette chanson. Bref difficile de s’ennuyer durant la cinquantaine de minutes (!) que dure l’album. Même si de petites baisses de régime (« Cabezon Fumao », « Mc Do ») sont forcément à déplorer, sur la première moitié de la galette les tubes s’enchaînent et c’est un vrai tour de force festif ou puissant, rapide et mélodique que nous livrent là les p’tits gars d’Okploïde !

Un album qu’ils dédient « à ceux qui se battent contre l’oppression du pouvoir et pour la liberté des peuples ». A écouter très fort les jours de déprime et à suivre absolument !

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