Guttermouth

Guttermouth >> Gusto

Contexte :

En 2002, jouissant d’une exposition nouvelle pour le groupe (due entre autre à la signature chez Epitaph et l’apparition sur le DVD « Punk-O-Rama vol.I »), Guttermouth tente de combler le départ de son bassiste de longue date et pousse un peu plus loin l’exploration sonore entamée sur le précédent album « Covered With Ants ». Le résultat sera le troublant mais assez jouissif « Gusto ».

Chronique :

Enregistré dans des conditions un peu particulières - les deux guitaristes jouant les parties de basse avec l’aide occasionnelle d’un musicien de studio -, l’album est un peu un fourre-tout musical où la bande d’allumés californiens laisse libre court à ses envies, quitte à dérouter ses hardcore fans. Car si l’on pouvait déjà s’étonner de trouver du banjo et du violon sur « I’m Destroying The World », nous avons ici parfois carrément affaire à de la country pur jus, comme sur « Gusto » et sa cruche digne de gros ploucs du Kentucky, ou encore « Foot-Long » et ses chœurs choubidou. L’ensemble n’en conserve pas moins un rythme soutenu et des paroles délibérément stupides.

L’expérimentation semble être le maître mot, même si le groupe regrettera cet album par la suite, comme le dira Mark sur le DVD « Live at the House of Blues » : « tout le monde fait des erreurs dans la vie. Certains font des enfants, d’autres font un album appelé « Gusto ». » Pourtant ces expériences sonores donnent parfois un beau résultat, comme ce « Looking Out For #1 », véritable chanson à boire de pub irlandais, avec sa guitare qui se fait passer pour un biniou, et son refrain entraînant avec ses chœurs de pirates bourrés… Très agréable également, « Twins », son côté jazzy (guitares claires, batterie jouée aux balais) et ses chœurs féminins interprétés par la chanteuse de Tsunami Bomb.

Bien sûr, on ne peut pas gagner à tous les coups. Ainsi, on aurait pu se passer facilement de « My Town » (toujours avec Emily de Tsunami Bomb) et son horrible clavier accompagnant une sorte de boite à rythme 8-bit, le tout rappelant les pires bandes-son de jeux vidéos des années 80.

Rassurez-vous, il y a quand même du punk rock sur ce disque, même s’il prend parfois une tournure inattendue. « Camp Fire Girl #62 » ouvre l’album sur un couplet à la guitare acoustique, avant de nous ressortir un bon vieux refrain punk tout en speed et guitares saturées. Mais alors que l’on croit être en terrain connu, débarque un clavier cheap et débile à souhait, mais qui donne finalement une touche très joviale pour peu que l’on prenne tout ça au second degré (ce qui de toute façon est obligatoire pour apprécier Guttermouth). « Scholarship In Punk », single de l’album, est un punk mélo adolescent plutôt banal, sympatoche mais pas inoubliable non plus.

S’en suit un lot de chansons punk de facture assez classique dans la lignée de l’album précédent, comme « Vacation », que l’on aurait aimée moins en retenue et plus explosive, « Walk Of Shame », très rafraîchissante avec sa guitare insouciante, son tempo qui ne redescend pas et ses paroles d’éternel ado (alors que les membres du groupe approchent la quarantaine…), « Pee In The Shower » au refrain entêtant, « My Girlfriend » et ses airs de bamba…

Mais le joyaux punk de l’album, injustement oublié et justifiant presque à lui seul l’achat de la galette, est sans conteste « Contribution ». Pas d’intro, on démarre direct dans le rouge avec des grosses guitares et surtout ce riff faisant presque penser à du Bigwig, cette batterie qui martèle et sa ligne de chant qui pour le coup n’a plus rien d’enjouée… Mark conserve son ton nasillard mais presque énervé, les paroles étant l’exact opposé de ce que le punk nous offre habituellement (« not gonna say I’m sorry would society even care, not gonna volunteer my time to cracked out mother, and all the others, wasting every chance they’re given »). Le chanteur est bien sur sarcastique, mais ce genre de paroles est un signe avant coureur de l’attitude du groupe qui leur vaudra d’être plus tard virés du Warped Tour, passant leur temps à s’en prendre aux autres, et étant les seuls à afficher un soutien (certes ironique) à George Bush en pleine campagne « Punk Against Bush ». Finalement, n’est-ce pas là le pur esprit de contradiction inhérent au punk ?

La gaudriole se termine sur « Lemon Water », qui n’a plus rien de rock, ressemblant plutôt à une sorte de samba triste (à ne pas confondre avec le chef-d’œuvre de Pierre Billon) où Mark fait ce qu’il fait de mieux, à savoir se foutre de la gueule du monde.

On aime ou on déteste cet album, mais en tout cas on ne peut pas reprocher au groupe de ne pas prendre de risques ou de sortir toujours le même disque. Au fond, ne pas brosser les fans dans le sens du poil et faire de la musique avant tout pour le fun, c’est ce qui fait l’essence même du punk rock, en tout cas la raison d’être de groupes comme Guttermouth, irrévérencieux mais néanmoins attachants.

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