Straightaway - Democracy Of Spreading Poverty

Contexte :

Avec des deals au Brésil, Japon, Argentine, Royaume-Uni, Australie, Allemagne, signés pour la sortie de l’album, les Straightaway étaient attendus en France. Pas de ‘grosses structures’ françaises pour sortir Democracy Of Spreading Poverty, le disque paraît ainsi en avril au Japon, se retrouve vite sur le net (+ de 30 000 téléchargements en 10 jours !), mais ne voit le jour que quelques mois plus tard en France grâce à Ascetic Music. Le petit label, pas forcément spécialisé dans le punk rock, est géré par Lotfi (chant) et son frère. Le disque bénéficie pourtant d’une distribution nationale via Nocturne. Pas négligeable…

Chronique :

Voilà du lourd ! Cette expression au lance-pierres, slogan promotionnel facile, colle pourtant dans tous les sens du terme au premier album des Straightaway : impressionnant de maîtrise, d’impact émotionnel, un disque dense, peut-être trop pour en venir à bout avec un plaisir constant… Pas si simple qu’on voudrait bien le dire, de pondre en 2007 un album de pur punk rock mélodique qui ne sente pas le réchauffé, l’attardé ou le ‘déjà-entendu’. La majorité des groupes du genre en France s’y casse les dents, d’autres se tournent vers des styles plus bruts ou expéditifs, où la mélodie est parfois réduite à peau de chagrin (ce n’est pas une critique attention !).

Du lourd donc, car Straightaway, question mélodies, y va fort (avis aux allergiques !). Le groupe pourrait même être qualifié d’ultra-mélodique, tant, à la manière d’un Undeclinable ou d’un Strung Out par exemple, ce qui frappe en premier c’est l’omniprésence du chant, fort bien délivré d’ailleurs ici, et des structures mélodiques vraiment originales par moments (même si un peu redondantes à la longue, c’est souvent le cas dans le style). Des trouvailles, beaucoup d’idées plutôt fines, de la personnalité dans chaque chanson prise une par une, n’empêchent pourtant pas l’overdose de guetter au fil de ces 40 minutes.
Chaque titre pris individuellement est donc un modèle du genre qui, pour situer un peu le style du groupe, manie à la perfection un chant à l’accent anglais irréprochable (c’est rare en France), des constructions de guitares chiadées mais ‘punkrockement’ efficaces, et un sens de la mélodie pas donné à tout le monde.

Le seul problème - et on en dit suffisamment de bien pour ici apporter quelques réserves – c’est que la prod compacte, massive et puissante du Loko Studio (peut-être plus adaptée à des groupes nécessitant une grosse décharge de décibels) n’allège pas suffisamment ces titres vraiment très chargés, en chœurs (magnifiques), en changements de rythmes (batteur hors pair, vraiment !) et en débauche de mélodies. Le son de la caisse claire par exemple, très à plat, pas assez sonore, se révèle fatigant sur la longueur. A la manière de Belvedere, période Fast Forward Eat The Tape, (à qui beaucoup de sonorités de chant (« Never Surrender ») ou certains plans instrumentaux (« Had Your Chance ») font penser), une prod plus sobre, plus ‘punk-rock’ aurait mieux mis en valeur le son du groupe. Réduire un peu la longueur du disque aurait été bénéfique aussi (après la trippante « Funk Da Place » par exemple), même si, on l’a dit, aucun titre n’est vraiment en dessous du lot.

Le perfectionnisme (et le talent) de Lotfi, compositeur/chanteur du groupe, se ressent à chaque minute y compris dans ses textes ciselés, matures, pas juste ‘engagés’… Le potentiel du groupe est énorme, sa vocation internationale palpable, rares sont les formations françaises à délivrer un premier album rempli à ce point de mélodicité, à rendre le punk rock mélodique aussi peu ‘simple’, sans avoir recours à des artifices techniques inutiles : un vrai tour de force !