Refused - The Shape Of Punk To Come

Date de publication : 2 novembre 2007 par Fab

Contexte :

Certains événements bouleversent des vies, restent gravés à jamais dans l’histoire, comme des pierres angulaires sans lesquelles le monde serait différent. Pour la scène hardcore mondiale, cette pierre angulaire est The Shape Of Punk To Come... Les auteurs de cette bombe à retardement sont les quatre génies suédois de Refused. Bombe à retardement, car la reconnaissance du groupe ne sera pas immédiate. Ce n’est que quelques années plus tard que la déflagration se fait ressentir. Une déflagration gigantesque qui changera bon nombres de vies. Une explosion peut-être d’autant plus forte que le combo a splitté peu de temps après avoir sorti son oeuvre ultime. Pouvait-il en être autrement ?... Refused était en avance sur son temps, et est mort trop tôt, mais la voie tracée est indélébile. On ne compte plus les groupes inspirés et influencés par cet album...

Chronique :

The Shape Of Punk To Come, titre prétentieux ou preuve de lucidité ? Les deux hypothèses sont souvent avancées. Mais ne serait-ce pas plutôt un hommage à Ornette Coleman, génie avant-gardiste du jazz qui enregistra, en 1959, The Shape Of Jazz To Come... Comme le jazzman, Refused fut aussi génial qu’en décalage avec son temps.

« A chimerical bombination in 12 bursts » est la phrase inscrite sur la pochette, sous le titre. Et il faut dire qu’elle résume plutôt bien l’album. Douze morceaux, douze claques, difficile de faire mieux. Reste, musicalement, à décrire ce que donne cet emblématique album ?

Le combo suédois est généralement classé dans le rayon hardcore, aux côtés de Sick Of It All, Madball et autres agités du bocal. Pourtant, Refused est aux antipodes de ces groupes. Déjà par le look. Les quatre Scandinaves, gringalets à l’allure de fils à papa, sont bien loin de l’image de coreux bodybuildés et tous tatoués chère à la scène hardcore. Mais c’est surtout musicalement que le quatuor se distingue. Si le terme « hardcore » colle parfaitement aux groupes pré-cités, pour Refused, il apparaît terriblement réducteur. En fait, The Shape Of Punk To Come est totalement, irrémédiablement, définitivement, inclassable. Les Scandinaves apportent des touches de jazz, d’electro, des sonorités tziganes ou même des rythmes latinos à leur musique, sans jamais s’égarer dans dans des destructurations sans limites. Ces sonorités sont savament dosées pour un résultat épatant.

Les chansons sont toutes imbriquées les unes aux autres, grâce à d’étonnants intermédiaires. Beats electro, passage radio et autres allocutions de Dennis Lyxzén lient tous les morceaux. Du coup, ils s’enchaînent comme une seule et unique oeuvre de 55 minutes, découpée en douze paragraphes et c’est finalement vraiment ainsi que s’apprécie l’oeuvre du groupe. Chaque chanson-paragraphe trouve sa place, bien définie. Et, dans chaque paragraphe, les différents éléments se mêlent avec justesse et précision. Les hurlements décérébrés alternent avec une voix plus posée et plus tendues, allant parfois jusqu’au parlé. Les riffs de guitares sont tantôt affolants de rapidité, tantôt plus mélodiques, voir mélancoliques. La batterie est soit martelée comme jamais, soit lente et oppressante. Les Suédois se permettent même d’introduire, ça et là, un violon, une contrebasse, un tambourin ou encore un accordéon. Ajoutez à cela les nombreux effets sur la guitare, et vous obtenez une musique aux multiples sonorités.

La musique de Refused est donc riche, complexe, inventive. Aucun des douze titres ne se ressemblent. « Worms of the senses / Faculties of the skull », le premier morceau, au nom si étrange, est une véritable décharge d’énergie, d’une incroyable intensité, où on retrouve quelques incartades electro. C’est d’ailleurs par ces rythmes binaires entêtants que se termine cette entrée en matière. Suit « Liberation frequency », parfait mix entre la fureur du hardcore et finesse des mélodies. Mais la palette du groupe est bien plus large. En démontre « Bruitist Pome #5 », interlude instrumental electro planant, juste le temps de laisser se reposer notre cerveau, ou « The deadly rythm » aux sonorités jazzy. Les gaillards maîtrisent à la perfection les changements de rythmes et jouent avec nos nerfs. L’intensité est alors à son paroxisme sur « New noise ». Un titre lourd de sens pour une chanson hors-norme qui, plus que les autres, aura marqué les esprits.
« Protest song ’68 » ralenti un peu le tempo, avec ses passages mélodieux. Puis, la malheureusement bien nommée, « Refused are fuckin dead », balance ce qui préjuge de l’ultime décharge de fureur du groupe, comme un dernier cri avant la mort. Mais c’est avec les deux derniers morceaux, emplis de mélancolie, que le groupe signe son testament. Le violon sur « Tannhäuser / Derivè » est tout simplement magnifique. Un titre magistral illustrant tout le talent des Scandinaves. L’album se termine en beauté avec l’intimiste « The Apollo program was a hoax », où accordéon, contrebasse et guitare sèche s’associent le temps d’une délicieuse berceuse.

Enfin, pour couronner le tout, les gaillards de Refused étaient furieusement engagés, révolutionnaires, anti-capitalistes et combattant de l’odre établi. Les textes de Dennis Lyxzén n’ont d’égal que la musique du combo. Si la perfection n’existe pas, alors on s’en approche drôlement...

55 minutes pendant lesquelles on passe par toute les émotions. Un chef-d’oeuvre dont l’écoute ne laisse pas indemne. Corps et cerveau retournés, au point de se demander comment on vivait sans The Shape Of Punk To Come... Un album cultissime où la musique est élevée au rang d’art. REFUSED ARE FUCKIN DEAD !!!



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BIOGRAPHIE DU GROUPE


Refused


Note : 20 / 20

Année : 1998

Durée : 55 minutes

Label : Burning Heart Records

Du Son : SOUND

Tracklist :

01. Worms of the senses / Faculties of the skull
02. Liveration frequency
03. The deadly rhythm
04. Summerholidays Vs Punkroutine
05. Bruitist Pome #5
06. New noise
07. The Refused Party program
08. Protest song '68
09. Refused are fuckin dead
10. The shape of punk to come
11. Tannhäuser / Derivè
12. The Apollo program was a hoax