Bad Religion @ Rockhal (Esch-Sur Alzette, Luxembourg)

Publié le 21 juin 2010 par Anarchibald , Vince

« Il y a un lieu où tout le monde peut-être heureux, c’est l’endroit le plus merveilleux sur cette putain de Terre : il est fait d’autoroutes illuminées la nuit, de pompes à essences où prix et volume ne sont qu’un seul et même affichage, des banquiers les plus véreux et des évadés fiscaux les plus radieux. Et tu sais que j’aimerais bien pouvoir y aller parce que… » parce que ce soir il y a Bad Religion pardi !

Ainsi, après avoir fait venir NOFX il y a presque deux ans jours pour jours, c’est une autre grande figure du punk rock mélo que la Rockhal luxembourgeoise nous offre ce soir. Pourtant là où la date de la bande au tonton Michel affichait sold out plusieurs semaines voire plusieurs mois avant, ici, malgré l’affiche tout aussi prometteuse, le rush n’a pas eu lieu. L’appel du foot ? Difficile à croire, surtout lorsque l’on passe devant la faible demi-douzaine de spectateur profitant de l’écran géant perdu au milieu des immeubles (c’est d’ailleurs à ça qu’on reconnait les pays hauts de gammes : en France vous êtes une centaine entassé sur un tabouret de bar pour mater une télé, alors que là ils sont à l’aise, au frais devant un écran de ciné) tandis que la Rockhal est quant à elle déjà bien assaillie : finalement pas sûr que toutes les places n’aient pas été vendues (on peut rentrer 1200 personnes).

Arrivée vers 21h10, trop tard pour pouvoir entendre ne serait-ce qu’une note de la première partie, assurée ce soir par Dropjaw, un groupe luxembourgeois, mais heureusement juste à temps pour aller se payer une bière, la laisser tranquillement couler dans le gosier et voir les vétérans débarquer sur scène. L’hymne national américain retentit, grandiloquent, et les cinq Californiens entrent en scène, flegmatiques, pas impressionnés pour un sou. Et il me suffit de voir Greg Graffin apparaître avec son polo Ben Sherman pour sentir un frisson me parcourir l’échine. C’est beau !

L’entrée en matière se fait avec la très rapide et énergique « Do What You Want », suivie de près par le duo inséparable « Ouverture » / « Sinister Rouge ». Le groupe frappe fort pour sa première date au Luxembourg en 30 ans (« On voulait être près pour l’occasion, en fait tous les concerts que l’on a faits depuis 30 ans étaient une répétition pour ce soir », expliquera Greg G. sourire aux lèvres). Car ils ont beau friser la cinquantaine, avoir 30 ans de carrière et je ne sais combien de centaines de concerts et de milliers de kilomètres au compteur : les gars de Bad Religion sont loin d’être des rock stars désabusées venant juste pour poser, toucher un cachet et se payer leur dose quotidienne. Non, ils viennent là pour la même raison qu’ils le faisaient lorsqu’ils avaient encore 20 piges. Et ça ce voit : la scène est occupée comme il faut, ça se chamaille, se vanne, y compris le public sur son accent, et bien entendu ça interprète ses morceaux avec classe : bref ça prend son pied. Et forcement du coup, nous aussi. Car la joie fixée sur le visage de ces quinquagénaires ne manque pas de gagner rapidement les nôtres, on en oublie aussitôt la sueur dans laquelle on commence à baigner.

C’est peut-être pour ça que dans la fosse on peine à aller au-delà de la bousculade gentillette. Cela ne passe que sporadiquement au degré supérieur. Notamment grâce aux grosses pointures comme « Generator », « Flat Earth Society », « Suffer », « I Want To Conquer The World », « Fuck Armageddon… This Is Hell ! » au milieu desquelles la très classe et posée « Epiphany » apportera un petit break. On n’oubliera pas non plus « Come Join Us », qui ne devait pas être jouée ce soir mais qui sera exécutée grâce à un fan (un grand merci à lui) situé au premier rang agitant son carton avec le titre inscrit dessus. Une pancarte improvisée qui, aussitôt saisie par le frontman, sera collée sous le nez de chaque membre du groupe, telle un pense-bête pour dire « ah tiens on l’a oubliée celle-là ». Grand moment de punk-rock. C’est carré, c’est pro, mais une part est laissée à l’inattendu, l’improvisation. Résumer trente années de carrière en 1h20 n’est pas chose aisée, même si Bad Religion s’y attèle au mieux, naviguant de « We’re Only Gonna Die » à « Requiem For Dissent », en passant par « Recipe For Hate » ou « No Direction » pour au final s’arrêter sur une douzaine d’albums de sa discographie.

Arrivent « Infected » et « American Jesus », dernière occasion offerte au public pour donner de la voix… avant le rappel bien sûr, car il y a pas de raison que la bande nous quitte si vite. Quelques instants dans le noir et revoilà en effet le groupe aussi enjoué que s’il venait de débuter le concert. Cela commence avec la très catchy « Punk Rock Song », suivie de l’imparable « 21st Century (Digital Boy) » pour finir tout en émotion avec « Sorrow ».

Très bonne soirée au final. On comprend comment ces zicos ont tenu 30 ans. La recette c’est de ne pas se prendre la tête, même quand on est l’un des plus grands groupes de l’histoire du punk-rock. Comme prévu, Bad Religion a mis sa tôle aux jeunots de Sum 41 qui avaient joué au même endroit un mois en demi plus tôt. « La valeur n’attend pas le nombre des années » ? Et ben si, on dirait. On espère que les californiens reviendront dans 10 ans pour fêter leur quarantième anniversaire. En tout cas nous, on sera là !


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