Interview - Peacocks (The)

Publié le 7 mai 2010 par Punkachu , Vince


Certainement un des groupes suisses les plus respectés dans la scène punk rock, The Peacocks, toujours fidèle au label People Like You, a sorti en 2010 son 6ème album : le détonnant After All. Questions à Hasu Langhard, guitariste/chanteur, qui mène le groupe depuis 20 ans maintenant.

Salut Hasu !
Alors ce nouvel album comment tu le sens ? Satisfait ? Les groupes répondent toujours « ouais c’est notre meilleur disque », sois original ! (rires)

  • A défaut d’être original je vais être honnête : il y a tout ce que l’on fait de mieux dans ce disque, des refrains pop, sauvages et un peu fous, c’est rock n’roll et punk avec aussi un influence plus country et lente et des choses plus trashy et garage. L’album dans son ensemble a, à mon sens, une fraîcheur et une empreinte proche du live, comme un jeune groupe qui viendrait de découvrir le rock n’roll en somme ! On l’a réalisé de manière très instinctive, sans faire de tri, sans suivre de mode ou trop réfléchir à quel morceau devrait aller sur le disque ou pas, notamment les morceaux plus lents. Et au final la sauce prend bien je crois, tu vois ce que je veux dire ?

Ouais carrément. Dis moi ça sort sur People Like You uniquement ou sur une multitude de labels comme vous l’avez fait par le passé ?

  • Nan juste PLY cette fois je pense.

Ok. Comme je disais vos albums sont ont souvent bénéficié de distribution internationales, notamment via Asian Man records (US) et Stomp records (Can). Cela a eu une influence sur l’affluence à vos concerts Outre-Atlantique, les chiffres de ventes etc, j’imagine ?

  • C’est sûr ça aide. Ce sont de bons labels avec des fanbases fidèles, parfois très locales mais quand même… Par exemple quand on a joué à San José en Californie, il y eu beaucoup de monde et ça a été une sacrée surprise pour nous. Ces gens nous avaient connus via Asian Man qui est basé pas loin. Idem à Montréal avec Stomp, les shows là-bas sont bondés.

En parlant de votre label et de son drôle de nom, ça fait quoi aux filles quand vous leur dites en backstage que vous êtes signés sur « I Used To Fuck People Like You In Prison Records » (le nom complet du label) ?

  • C’est pas très classe… Non mais on n’est pas très concernés par ces histoires de filles en backstage. C’est sûr on continue à faire de la musique pour rencontrer des gens sympas et intéressants au maximum, mais pas pour en tirer avantage. J’avoue qu’on l’a fait et que ça a parfois marché mais si ça avait été la motivation principale, tu penses bien qu’on ne serait plus là…

Plus sérieusement, People Like You est un des labels punk / rock n’roll/ psycho les plus appréciés en Europe. Comment se sont passées la rencontre et la signature avec eux ?

  • En fait je ne m’en souviens plus trop… Je suppose qu’on était dans leur collimateur tout simplement et au moment d’enregistrer Touch And Go ils nous ont contactés et on dit « on veut le sortir » et c’est ce qui s’est passé. Probablement aussi que d’autres groupes avait parlé de nous au boss du label, c’est un peu toujours comme ça que ça se passe dans notre scène, par connexions, entre-aide…

Tu as déjà des retours sur les nouvelles chansons en live ? J’imagine que les fans ne sont pas trop perturbés, c’est du pur Peacocks !

  • Effectivement ça marche bien. Je veux dire, ce sont des chansons faciles à comprendre et à retenir, et comme tu le dis, elles se marient bien à notre son antérieur. De plus on essaie de plus en plus de faire des sets rallongés, de manière à pouvoir jouer pas mal d’anciens morceaux. Comme ça personne ne peut se plaindre ! (rires)

Vous aviez l’habitude d’inclure des plans ska dans vos albums et dans certaines chansons. Ce n’est plus du tout le cas ces derniers temps. Vous allez y revenir un jour ?

  • Ouais pourquoi pas. Tu sais ça nous a pris du temps pour perdre cette étiquette « ska », mais maintenant que c’est fait pourquoi pas retenter le coup, sans doute sur le prochain opus.

Je pose la question parce que je suis un grand amateur de ska. Quelles sont tes références en la matière ?

  • De base ce que j’aime c’est le rythme. Au départ les groupes ska que j’ai écoutés c’était The Specials, ou Operation Ivy dans un autre style. J’ai aussi toujours apprécié le son de la Nouvelle-Orléans et ses relents ska. Je pense à Fats Domino par exemple. Après tout c’est de ce son du Delta que la Jamaïque a fait naître le ska.
    Les premiers groupes ska que j’ai vus live c’étaient El Bosso & Die Ping Pongs et The Toasters. Je suppose qu’ils m’ont marqué même si ce ne sont pas mes groupes favoris. Je suis plus adepte de son old school.

Est-ce que tu es intéressé par l’imagerie gore et cinématographique qui accompagne souvent le psychobilly ? Tu sais le cliché quoi…

  • J’aime beaucoup les vieux films gores italiens, leur côté kitch tout ça… mais pas vraiment le cinéma d’horreur en général. Et alors dans la musique clairement, c’est non !

Pour rester dans les idées reçues sur le psycho, comment juges-tu l’évolution de la scène ces 20 dernières années. En France on pense souvent que l’aspect apolitique de cette musique a laissé une plus grande place, sinon une tolérance, vis-à-vis du public d’extrême-droite. En tout cas il reste une ambiguité, même si c’est nié généralement par les psychos purs et durs…

  • Pour moi, comme toute chose la scène psychobilly était fraîche et neuve à ses débuts, c’était excitant. Je n’ai jamais été un fan de la violence mais il faut croire que certains y trouvaient leur compte et l’ont toléré peut-être plus que dans d’autres styles. Il y a effectivement un problème avec cette volonté apolitique, il y a eu une dérive, certains ont emprunté de mauvais chemins et, à vouloir tolérer tout le monde, ils ont laissé la scène se gangréner d’idiots au lieu de leur botter les fesses. Cela a presque tué la scène au début des 90’s. Sur notre premier single il y avait des symboles anti-fascistes et certains nous ont détestés pour ça. Mais aujourd’hui je pense que le public psycho est en meilleure santé, les nazis ont compris qu’il n’avaient plus rien à y faire. En tout cas en Allemagne et en Suisse. J’avoue ne pas connaître la situation en France.

Quel est ton groupe préféré en psycho ? The Long Tall Texans ? (personnellement je suis très fan de The Creepshow)

  • Je dirais Guan Batz, Batmobile, Sting-Rays, Long Tall Texans effectivement, Quakes, Caravans, Restless, Frenzy, NekRomantix, Mad Sin, Demented Are Go, Meteors avec Nigel Lewis… Tous les classiques en somme. Mes chansons favorites sont « I See Red » par Frenzy ou « Do The Ghost » par X-Men. Le meilleur groupe live sans doute Guana Batz et le meilleur disque je dirais In Heaven des Meteors.
    The Creepshow en effet sont bons, c’est un peu moi qui ai dit à People Like You de les signer, ils ont écouté et ont fini par le faire. Ce sont en plus des gens très bien. Mais le truc c’est que j’ai découvert le psychobilly au début des 80’s, j’étais très excité par cette nouvelle scène et il est impossible de recréer cette sensation aujourd’hui avec des groupes récents, c’est comme ça… Mais j’aime aller à leurs concerts.

Comment est la scène punk/rockab’/ska en Suisse en ce moment ? On connaît quelques groupes comme Kalles Kaviar, Open Season ou Admiral James T. à la rigueur, mais à part ça…

  • Le ska était encore « gros » il y a 5 ans, mais la mode s’est épuisée parce que trop de groupes, trop de concerts, plus assez de créativité. Il ne reste plus que quelques groupes. Open Season ouais, ils restent populaires et assez pro mais c’est plus reggae/dancehall/pop dorénavant. L’année dernière, ils ont fait un excellent disque de ska oldschool, vraiment cool. C’est d’ailleurs Admiral James T. qui l’a produit, c’est mon frère en fait (ndr : David Langhard). On est proche des Open Season, ils ont même booké quelques shows pour nous l’an dernier. On se connaît tous bien dans cette scène assez restreinte, pas beaucoup de groupes, mais tous très actifs.
    Je pourrais citer aussi Monster/Beat Man, toujours en vie, j’aime aussi beaucoup Mama Rosin personnellement avec cette influence cajun très particulière. En garage punk il y a quelques groupes comme The Jackets et pas mal de formations indie, mais c’est une scène différente.

Une question con en passant : ça vous fait pas chier d’avoir encore votre monnaie nationale et d’être entourés de pays où c’est l’Euro qui a cours ?

  • Pas trop, c’est sûr parfois c’est chiant par exemple quand la Livre anglaise s’effondre et que les prix restent les mêmes, au niveau conversion on est perdant…

Plus sérieusement, que pense-tu de ton pays en 2010 ? En France, récemment, on n’a parlé de la Suisse que pour évoquer l’affaire du vote anti-minarets, le cas Polanski ou la crise bancaire. C’est un peu triste, non ? Heureusement que vous avez Roger Federer et Titeuf ! (rires)

  • C’est vrai que parfois on n’est pas très fier de notre pays… Cette histoire de minarets est juste incroyable… Figure-toi que Polanski habitait un moment pas très loin de chez moi, quand il était assigné à résidence il y avait des TV et des medias en permanence… Enfin bon après tout dans chaque pays il y a des sujets un peu honteux à assumer, n’est-ce pas ?…

Ouais en France aussi… D’ailleurs pourquoi on ne vous y voit pas plus souvent ?

  • Le truc c’est qu’on n’a plus beaucoup de « connections ». L’autre chose c’est qu’en France c’est difficile d’organiser des tournées dans de petits endroits. Trop de règles, de taxes etc, tu vois de quoi je parle ?... Il y a aussi tous ces festivals un peu « officiels » qui ne veulent pas forcément de petits groupes comme nous.

Tu connais des groupes français ?

  • Oh ouais. Dans les 80’s les groupes français étaient très populaires par chez nous, comme Berurier Noir, Ludwig Von 88, « et tout ça » (ndr : en français dans le texte !). Sur notre premier single il y avait une cover des Crabs, un groupe de chez vous. Sur notre deuxième album on avait aussi fait une reprise de la Mano Negra. Notre première tournée en Suisse s’est même faite avec un groupe français… French Lovers je crois. J’ai d’autres exemples : on avait organisé des concerts pour les Happy Drivers aussi. Donc ouais on avait pas mal de connaissances en France. Mat des Washington Dead Cats a organisé notre premier concert à Paris l’an dernier, là on vient de jouer avec les Banane Metalik (très bons !). On connait d’autres groupes comme Astro Zombies, Monster Club, Tight Fitting Pants ou Two Tone Club etc…

Tout autre chose, comment tu expliques que Gimme More est un de vos meilleurs disques (à mon goût) alors qu’il est constitué de chutes de studio des sessions de Touch And Go ?

  • Oh tu sais c’est toujours pareil, certains aiment, d’autres non. Moi je ne crois pas que ce soit notre meilleur mais les goûts et les couleurs, tu sais…

Quel est le meilleur Peacocks pour toi ?

  • En dehors du nouveau hein, c’est ça ? (rires) It’s Time For… je dirais.

Qu’écoutes-tu actuellement ? Dans ta voiture, sur ton canapé et dans ton bain ?

  • Dans ma voiture je n’écoute que la radio en fait, sur mon canapé des trucs récents, des démos que les gens nous filent ou qu’on m’envoie, et du vieux rock n’roll. Et comme je ne prends pas de bains… Nan mais en fait je fais de la musique l’essentiel du temps alors chez moi j’en écoute assez peu.

Qu’est-ce que tu souhaites pour l’évolution musicale des Peacocks ? Jazz ? Swing ? Ska ?

  • Mmmh… Old rythm & blues versus new-wave power pop-punk !

Vous avez déjà tourné un peu partout dans le monde. Est-ce qu’il y a un endroit particulier pour toi, un endroit qui t’a plus touché ? Un endroit où tu aimerais fêter les 20 ans du groupe ?

  • Pas vraiment, actuellement tu peux passer un bon ou un mauvais moment à peu près partout… Même si culturellement il y a des villes sympas à visiter, où rencontrer des amis… Mais non on ne compte pas faire quoi que ce soit de particulier pour célébrer nos 20 ans. On est toujours un jeune groupe avec des idées et des envies neuves, on évolue toujours, c’est le plus important. Et puis les gens n’ont pas besoin de savoir que l’on est si vieux ! (rires)

Ok merci pour ta disponibilité Hasu, continuez comme ça !

  • Merci à toi, prenez soin de vous, à bientôt !

(Merci à Carmen @ "People Like You" / Questions : Vince / Traduction : Punkachu)


Groupe associé
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