Aggrolites (The) - Reggae Hit L.A.

Date de publication : 4 octobre 2008 par Vince

Contexte :

Un an et demi après leur précédent album, moins de trois mois après celui de Tim Armstrong auquel ils ont prêté main (très) forte, les 5 fantastiques de Los Angeles, les papes de l’early reggae, reviennent avec leur troisième effort et un style toujours aussi inimitable pour se hisser tout tout tout en haut de l’affiche.

Chronique :

J’en vois déjà qui grognent dans leur coin : « ça y est l’autre il nous colle du reggae sur PunkFiction maintenant, c’est vraiment de la musique de rastaquouères quand même !… ». Ce à quoi je réponds « hola l’ami, laisse-moi t’expliquer !… ».

D’accord, The Aggrolites est un groupe de reggae, mais pas du reggae comme les autres. Les gars sont cinq, en formation réduite à deux guitares, basse, batterie, clavier. Et l’early reggae, c’est un peu plus que du reggae. L’early reggae, aussi connu sous le nom de skinhead reggae, parce qu’il était écouté par les skins à la fin des 60’s ; est un style qui fait la part belle au clavier, où les cuivres sont généralement absents, qui lorgne parfois vers le rocksteady, et qui n’hésite pas à mettre de la soul et même du funk dans son vin jamaïcain. En fait, si les punks faisaient du reggae, du vrai, ça serait celui-ci.

15 titres sur le cd, rien à jeter. Ce qui frappe d’abord, c’est le style du groupe, souvent copié, jamais égalé. "Ça tourne" comme on dit, c’est fluide et l’alchimie fonctionne à merveille. Le reggae, plus saccadé que sur un Wailers ou un Burning Spear, groupes finalement assez éloignés de The Aggrolites, est assorti d’une voix soul, celle du frontman incontestable, Jesse Wagner, qui a LE feeling. Sûr que sur la scène de L.A., il doit y avoir des musiciens plus virtuoses que ces cinq là, mais eux ont tout compris au reggae et ont particulièrement bien assimilé leur racines américaines, soul, funk, rock…

Ce qui frappe c’est que l’ambiance de disque rappelle les boulevards californiens, ceux des quartiers excentrés, éloignés de l’océan, ceux qui longent les autoroutes, qui sont parsemés de stations essence et de Taco Bell, où les ouvriers s’arrêtent pour faire le plein et manger un morceau. Les plages jamaïcaines sont loin, mais l’ambiance est bonne, la Bud coule à flot, et des latinos, des blacks et des blancs becs dansent ensemble dans un club qui autrefois recevait la crème des jazzmen.

Les chansons de The Aggrolites sont collégiales, chaque pièce est indispensable, mais le son de clavier de Roger Rivas, ce petit sifflement vintage venu des 70’s est leur marque de fabrique, leur générateur de mélodies. Car le reste du groupe, sur la plupart des titres, se charge de tenir avec la précision chirurgicale de Mc Namara et Troy une rythmique qui constitue la colonne vertébrale du groupe. Sur « Well Runs Dry (Free Soul) », c’est même le chanteur, Jesse Wagner, qui donne au titre de l’épaisseur, avec sa voix rauque qui n’a pas grand-chose à envier aux stars de Stax, Motown ou Atlantic que furent Wilson Pickett, Ben E. King, ou Otis Redding.

Le début de l’album regorge de belles réussites, comme « Work It » et sa mémorable intro ou « Faster Bullet » avec sa voix soul fantastique. « Reggae Hit L.A. », qui donne son nom à l’album, apporte le funk des Meters au cœur du cocktail de The Aggrolites. On pense forcément à James Brown. Car le son est totalement américain. Le sifflement de clavier ferait presque penser aux Doors, histoire de donner par ci par là une petite touche psychédélique. Mais ici les futes pattes d’eph’ et les chemises bariolées n’ont pas droit de citer. The Aggrolites cultivent l’élégance et le style.

La fin du disque par contre (« Balhead Rooster », « We Came To Score », « Hip To Hit ») tourne un chouia en rond et fait passer le disque de peu à côté du statut de chef d’œuvre. C’est à mon avis trop lent et répétitif, parfois à la limite de l’easy listening. Pas désagréable, loin de là, mais trop noyé dans la masse.

Ce qu’il faudra surtout retenir ce troisième opus, c’est deux purs hits. « Let’s Pack Our Bags », une chanson d’amour vous l’aviez compris, à la finesse qui vous fait hisser les poils des bras. Un petit son de trombone par Tom Cook (de See Spot), invité pour l’occasion, donne un petit supplément de chaleur, et l’orchestration, précise et raffinée, achève de convaincre les plus réticents.

Et surtout, The Aggrolites nous claque une tuerie comme rarement j’avais pu en voir. « Free Time » est tout simplement l’une des plus belles chansons qu’il m’ait été donné d’entendre. Un tube reggae énergique, qui bouge, qui danse, qui swingue, parfaitement arrangé, les breaks là où il faut qu’ils soient, une voix parfaite, les notes de piano qui tombent…

Grosse, grosse impression ce disque. The Aggrolites est aujourd’hui la figure de proue de la scène early reggae, et plus largement de la galaxie ska / rocksteady / reggae mondiale. On comprend pourquoi à l’écoute de titres de cette qualité. Respect des anciens, élégance, finesse, originalité et modernité rétro, The Aggrolites c’est un peu tout ça, l’Amérique et l’Angleterre jamaïcaine mélangées, les plages de Montego Bay, les rues mal famées de Concrete Jungle, les bars de Memphis et les sound-system de Brixton.



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BIOGRAPHIE DU GROUPE


Aggrolites (The)


Note : 17,5 / 20

Année : 2007

Durée : 51 minutes

Label : Hellcat Records

Du Son : SOUND

Tracklist :

01. Work It
02. Faster Bullet
03. You Got 5
04. Reconcile
05. Reggae Hit L.A.
06. Lets Pack Our Bags
07. Left Red
08. Free Time
09. Lucky Streak
10. Rhythm & Light
11. Well Runs Dry (Free Soul)
12. Hip To It
13. Fire Girl
14. Baldhead Rooster (Chapter 3)
15. We Came To Score