ISP - ... Will Rocket You

Contexte :

Au moment de sortir ce 3ème album, ISP c’est déjà quasiment quinze ans d’expérience de la scène punk rock française. Quinze ans qui justifient largement la reconnaissance plutôt large dont bénéficie le groupe dans le milieu underground. Après un album en forme de premier jet en 1999, le groupe avait sorti un deuxième méfait, Rusty Ambition, qui portait pas mal son nom. En effet le groupe peinait encore à l’époque à affiner son style. Il aura fallu attendre 2007 et un excellent split-EP avec Unlogistic pour sentir que la bande parvenait à une certaine maturité discographique.

Chronique :

Parce que pour ce qui est de la scène, la réputation d’ISP n’est plus à faire. La faute à une clique de joyeux gus tels Pat, le bassiste qui a plus d’une corde à sa basse (il évolue aussi dans Bad Chickens et Sons Of Buddha), et évidemment Rico, le chanteur bondissant au menton plus fourni que le crâne...
Des concerts à la pelle et des prestations punkissimes, mais voilà sur disque le groupe n’avait jamais vraiment convaincu. Will Rocket You, successeur du Rusty Ambition de 2005 (où Pierre des Burning Heads était à la prod) se devait de confirmer la bonne impression laissée par le split-EP avec Unlogistic.
On retrouve d’ailleurs plusieurs points positifs présents sur ce split de 2007 : le titre "Dreamy Bottox Smile" foutrement énergique, la présence de quelques voix féminines (Anita ’Baby Face’ également en featuring sur "Platinium Master Card", et la voix de Jill sur "Your Moma Is A Psycho").

"What The Fuck Is That" ouvre les hostilités en 47 secondes tout en choeurs. Plus fédérateur tu meurs. Suit "Bomb Test" où le groupe montre une facette plus punk n’roll et groovy (aaah quand Pat fait l’amour à sa basse, on en redemande !). Sur 15 morceaux, pas un évidemment, n’atteint les 3 minutes. De l’expéditif et une sonorité old school qui fait parfaitement le lien entre les 80’s et aujourd’hui, entre CIV et les Burning dirons-nous. Le groupe sait se faire plus hardcore à l’envie, plus dansant à d’autres, mêlant ses influences avec énergie et humour en guise d’assaisonnement.

Certains morceaux marquent plus que d’autres, notamment ceux où le travail de choeurs est plus présent ("Now"), ceux où ISP donne envie de faire se trémousser les popotins ("Bomb Test" ou l’excellente "No Rescue"), ceux où la bande arrive à ajouter un supplément d’âme mélodique ("Promise Me", peut-être le meilleur morceau du disque), ou encore ceux où la vitesse n’a d’égale que l’inutilité jubilatoire du morceau ("Your Moma Is A Psycho", "Red Neck Side", 26 secondes)...
Bref ISP c’est le genre de groupe bougrement attachant, qui évolue dans un style simple voire simpliste, clairement assumé comme tel, qui n’ambitionne pas de révolutionner un style qui ne peut pas l’être, qui traite ses influences avec autant de respect que de recul sur sa propre musique. L’autodérision n’est donc jamais très loin et pour l’auditeur, comme pour le spectateur dans le pit, ça en devient carrément jouissif ("Retro Kid Looser").

Avec tout ça ISP ne se moque en plus pas de son public. A signaler en effet l’excellente tenue du livret dessiné par Ulrich Totier (batteur des Bad Chickens). On retrouve le même graphisme ringardo-naïf qui avait déjà fait impression sur le split avec Unlogistic (il a signé également l’artwork du split Backsight / Kids On The Move chez Eternalis Rcds).
Beaucoup de points positifs sur ce disque donc. A commencer par le son et le mastering de Bill Stevenson (Blasting Room Studio) qui uniformise bien les différentes facettes du groupe autant qu’il leur donne de la consistance. Il en ressort une belle constance, une identité plus évidente (sans atteindre des sommets d’originalité non plus hein), une cohérence à laquelle l’intervention de Mötör Ed (Unco/Sons Of Buddha) n’est sans doute pas étrangère.

Sans aucun doute la meilleure prod d’ISP à ce jour, le disque le plus abouti (même si pas exempts de défauts), bref une raison supplémentaire d’aller soutenir le groupe en concert... et de boire moins pour vous payer le disque (l’objet vaut le coup en plus), bande de soulards !