Betrayed - Substance

Date de publication : 28 mars 2008 par Roger

Contexte :

Après la sortie d’un EP, Addiction qui a confirmé le talent de ce line-up légendaire, Betrayed s’empresse de participer à quelques dates en compagnie d’amis (Have Heart, Verse, et Blue Monday). Ils sont contactés quelques mois plus tard par Rivalry Records, un des plus gros labels hardcore au monde, pour enregistrer un split avec Champion, groupe dans lequel Aram Aslanian n’est autre que le guitariste. Poussés par l’inspiration, ils décident de composer leur premier album, Substance, qui sortira en mai 2006, grâce à Equal Vision. Ce disque élève Betrayed au rang des grands espoirs de la scène. Malheureusement, quelques mois après, Todd Jones et sa bande annonce la fin de l’aventure. Le 21 Octobre 2006, ils organisent un dernier concert avec émotion, supportés par Lights Out, Pressure, Retaliate et The First Step entre autres.

Chronique :

On ne peut être qu’agréablement surpris lorsqu’on apprend que Substance est le résultat d’une collaboration entre deux légendes vivantes du modern hardcore US nommées Aram Aslanian (Champion, The First Step) et Todd Jones (Carry On, Terror, Internal Affairs, Blacklisted). Nos compères n’ont pas changé de style pour ce side-project, et ils nous replongent avec plaisir dans un Hardcore/Punk, très inspiré par les pointures que sont Chains Of Strength, Gorilla Biscuits, Minor Threat, Warzone. En reprenant ce style Youth Crew et en y ajoutant quelques mélodies, ils s’affirment logiquement Straight-Edge et luttent contre les pensées nihilistes. Là où il paraît parfois dure de différencier certains titres de Minor Threat, cette modernisation du style permet à l’auditeur de plus facilement accrocher et de ne pas s’y perdre, tout en gardant cette rapidité d’exécution à toute épreuve.

Le plus surprenant, avec Betrayed, c’est de connaître le véritable procédé de composition de l’album. En effet, séparés par des centaines de kilomètres, éloignant Vancouver du Sud des Etats-Unis, Jones enregistre les guitares, puis il les envoie à Arslanian qui pose ses lyrics dessus. C’est ce qui peut également expliquer le peu de dates exécutées par le combo ainsi que sa dissolution prématurée. Heureusement pour nous, cet inconvénient majeur ne les empêchera pas de composer cet album culte et poignant, qui aura marqué énormément de kids à sa sortie.

Todd Jones est souvent clair dans ses interviews : « No one can fuck with my riffs ». Pour beaucoup, cette phrase peut sembler prétentieuse, mais on peut à l’unanimité constater qu’elle n’est pas éloignée de la vérité. Le maître nous gâte encore une fois grâce à des passages rapides, parfois lourds et qui sonnent toujours justes. Soutenu par Todd Preboski (ex-Champion) à la batterie, et Greg Bacon (ex-Carry On), il nous offre d’excellentes structures, variant entre simplicité et complexité, laissant place à de véritable tubes. L’album oscille entre des titres plutôt expéditifs, notamment « Nothing Breaks Us Apart » qui sonne très Stand & Fight, et des moments d’accalmie. Il s’avère également talentueux pour pimenter les titres de quelques soli (« Work For It »), ou des lignes mélodiques qui accrochent l’oreille, choses très rares dans le style.
Cependant, là où il passe au rang de génie, c’est grâce aux petits passages mélodiques au son si particulier, qui laissent place à un mid-tempo presque punk-rock et donnent à certaines compositions, des sonorités se rapprochant du Post/Hardcore (« A Light In The Dark », « The City Of Lights », la fabuleuse « Bring It To Life » et sa fin planante, ou bien « Time Will Tell »).

Dur de départager une chanson au milieu de ces treize pistes, et ce n’est pas le but d’une chronique. Cependant on peut facilement élever « Understand » au rang de tube interplanétaire. Celle-ci commence par son fameux larsen, accompagné d’un roulement de batterie qui introduit une ligne mélodique magique, dont seul Todd Jones a le secret. Un pont s’impose au milieu du titre, donnant lieu à une complémentarité des instruments époustouflante, à la fois subtile et oppressante qui laisse place aux emblématiques gang-vocals : "Still growing up ! Still fucking up ! Still lost and desperate for answers !". Le genre de chansons qui vous hérissent les poils, vous donne la chaire de poule et vous révolte, tant les paroles concernent chacun d’entre nous, Straight-Edge ou pas.

Aram Aslanian avoue qu’il comprend les personnes qui préfèrent se réfugier dans la drogue plutôt que d’affronter la réalité. Tout le long, il nous offre un florilège de messages, parfois clichés certes, qui concernent chacun d’entre nous : il ne faut pas se noyer dans la boisson et la drogue mais plutôt gérer soi-même ses actions et s’unir pour lutter contre ceux qui ont rendu ce monde aussi déprimant. Sa voix est atypique mais loin d’être désagréable et donne tout son sens aux paroles. On est agréablement surpris par les gang-vocals, très présents, qui portent les accroches symboliques du discours du groupe.

Betrayed signe un des meilleurs albums hardcore de ce début de siècle, et donne à Substance un goût amer : le seul et unique effort d’une discographie qu’on aurait voulue plus conséquente. Consolez-vous en l’écoutant en boucle.



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BIOGRAPHIE DU GROUPE


Betrayed


Note : 19 / 20

Année : 2006

Durée : 28 minutes

Label : Equal Vision Records

Du Son : SOUND

Tracklist :

01. Think Twice
02. Substance
03. Consequence
04. The City Lights
05. Crossroads
06. Work For It
07. A Light In The Dark
08. Understand
09. Self Doubt
10. Nothings Break Us Apart
11. Time Well
12. Bring It To Life
13. I'm Not Afraid