Lifetime - Lifetime

Contexte :

En 1998, une année après la sortie de son troisième album, Jersey’s Best Dancers, Lifetime prend la grave décision de se séparer, laissant un grand vide dans le Hardcore/Punk mélodique US. Personne n’arrive à y croire, l’un des plus grands espoirs de la scène quitte le circuit et abandonne tout une génération de fans. Dan Yemin s’empresse de créer Kid Dynamite et Paint It Black avec son ami Dave Wagenshutz, Ari Hatz et Dave Palaitis créent Zero Zero et Pete Martin intègre le premier line-up de Jets To Brazil.
Heureusement, ce beau petit monde retrouvera l’envie commune de faire quelques shows ensemble en 2005. Après une petite tournée de reformation, dont les fonts récoltés ont été reversés à des associations caritatives, Pete Wentz, membre des Fall Out Boy et patron de Decaydence Records, propose au groupe de composer un nouvel album. Lifetime accepte et sort d’abord le 7’’ Two Songs en 2006. C’est une année plus tard que le groupe nous offre enfin son nouvel album, éponyme.

Chronique :

Quel plaisir de retrouver enfin un groupe tel que Lifetime, monument du hardcore melo US. Évidemment cette scène a donné naissance à de grands groupes depuis 1997, et la liste serait trop longue pour la commencer, mais on peut sincèrement dire que leur musique, assez unique en son genre, avait manqué. En pleine période où la reformation est à la mode, c’est encore plus plaisant lorsqu’on remarque à quelle point celle-ci est sans arrières-pensées et très loin d’être une affaire de business : des bénéfices de concerts ont été entièrement reversés à des associations pour la recherche contre le cancer du sein, et ce nouvel album se révèle plus excellent que jamais. Que tous les groupes en prennent de la graine !

On pouvait se demander si les dix ans qui séparent Jersey’s Best Dancers et ce dernier effort allaient être bénéfiques ou pas pour le son du groupe. Soyez rassurés, l’inspiration est plus que jamais présente sur ce disque et on pourrait même le considérer comme le meilleur album de Lifetime. Le plus étonnant, c’est que ce changement de label pour Decaydence Records, dirigé par un membre d’un des groupes Emo/Punk/Fashion les plus controversés, semble être bénéfique. Nos légendes originaires du New-Jersey semblent avoir trouvé un second souffle et nous balance l’un des meilleurs disques de l’année. Le plus marrant dans tout cela, c’est qu’ils concurrencent avec tout les nouveaux groupes qu’ils ont auparavant influencés, et à ce petit jeu les vieux restent totalement crédibles !

Vous allez vite comprendre tout cela puisque l’album commence, comme à son habitude, par un tube, « Northbound Breakdown », qui nous replonge dix ans en arrière. Mis à part une qualité de son qui n’a jamais été aussi parfaite, le groupe n’a foncièrement pas changé et nous offre une ribambelle de titres hardcore aux mélodies très catchy. On peut seulement remarquer une plus grosse influence pop/punk, laissant place à des véritable perles (« Just Quiet Evening », « Haircuts And T-Shirts », « Can’t Think About It Now »).

Chacune des pistes est fantastique et nous fait passer par un panel de sentiments, une des ces rares albums qui donnent à l’auditeur un sentiment de plénitude rare. Là encore, ils enchaînent les tubes pendant 23 minutes, et les jeux de Dan Yemin et Pete Martin n’ont jamais été aussi virulents, chacun touchant la mélodie qui fait mouche (« Try And Stay Awake », « Yeems Song For Nothing » et « Song For Mel »).
L’émotion est également au rendez-vous, avec des riffs mélancoliques comme sur « Spiders In The Garden » et « All Night Long » à l’introduction de basse très bien exécutée par un Dave Palaitis, plutôt discret sur ce disque par ailleurs. De plus, personne ne pourra rester insensible à « Airport Monday Morning » qui surclasse le reste de l’album par sa mélodie, très bien rythmée par Scott Galley, variant entre passages rapides et mid-tempo entraînants.

Ari (un ami qui nous veut du bien), ne déçoit pas du tout et immortalise là sa plus belle prestation vocale pour Lifetime. Il n’a jamais fait passer autant d’émotions que sur ce disque et c’est avec plaisir qu’il varie entre voix claire et timbre un peu plus écorché. Il sauve même les meubles sur « Records At Nite », titre très bon mais un peu en dessous des autres. Enfin, il défend toujours aussi bien ses paroles, propres au style, qui se veulent très proche de la vie de tous les jours, et qui épargnent ici la politique pour des sujets un peu plus funs.

On peut être rassurés, les compères du New-Jersey n’ont pas changé depuis toutes ces années. Lifetime est un hommage tout entier à la musique punk rock et est sûrement le meilleur album du groupe.