Thrice - The Alchemy Index : Vols. 1 & 2 - Fire & Water

Date de publication : 12 novembre 2007 par Punkachu

Contexte :

Thrice avait en 2005 laissé ses fans en ordre dispersé. Vheissu en avait déstabilisé plus d’un et nombreux furent ceux à lâcher prise quand d’autres, venus d’horizons moins underground sans doute, et n’ayant pas connaissance du passé du groupe (ah The Illusion Of Safety !), adhéraient à la nouvelle direction prise par le groupe. Le Red Sky EP paru en 2006 n’avait en rien rassuré avec ses B-sides et versions acoustiques sans grand intérêt… Début 2007, Thrice a déjà commencé à composé son nouvel effort, l’annonce de la parution d’un quadruple EP basé sur les quatre éléments laissait présager d’un projet des plus ambitieux, mais pas forcément compatible avec les aspirations de la major Island /Def Jam. Ainsi fin juin la bande se sépare de la maison de disques pour débarquer chez Vagrant Records.

Chronique :

A ce moment là, les premiers teasers et vidéos ‘studio diary’ ont émergé sur le net. Thrice brouille les pistes, laisse entrevoir un projet encore plus abouti que Vheissu, met en avant ici, dix secondes de musique éthérée, là, un déferlement apocalyptique, la semaine suivante une jaquette est dévoilée : encore une fois très énigmatique, ornée d’un titre dans la veine de Vheissu et cette fois-ci clairement inspirée d’une démarche artistique empreinte d’ésotérisme. The Alchemy Index et ses deux volets suscite les interrogations, ce qui est sûr pour le coup c’est que Thrice s’est définitivement envolé vers d’autres contrées, pas forcément connues du commun des mortels, on ne les rattrapera plus, le groupe s’est enfermé dans son studio, un vase clôt où bouillonne les idées, les quatre d’Orange County paraissent complètement perchés, l’histoire des quatre éléments en fait sourire certains, d’autres trépignent d’impatience. Et au final, une fois l’objet entre les mains et ce souffle génial, qu’est la musique de Thrice, entre les oreilles… que penser ?

Peut-être que tout ce qu’on pourrait dire, critiquer ou commenter sur ce disque se résume à cette question. Les qualités comme les défauts de la démarche sont là : ce disque laisse sur le derrière, songeur pour le moins, on ne saurait dire si on touche là au sommet de la carrière d’un groupe à la dimension hors normes, ou au début de la fin d’un quatuor qui à trop chercher dans le cosmique, les confins, l’extra-large, le divin presque, se serait un peu perdu en chemin.

Alors il y a évidemment plusieurs façons d’aborder cet album à deux têtes. Déjà difficile de juger du concept dans son ensemble, comme d’un cycle de romans métaphysiques dont on n’aurait que les deux premiers tomes. Les déçus de l’époque major le resteront et pour sûr seront rebuter par l’exigence de l’album (une dizaine d’écoutes nécessaires). D’autres seront déroutés par le changement radical entre la furie post-hardcore de Fire (« The Messenger ») et les 6 titres suivants qui constituent l’EP Water. Ce dernier est évidemment plus dur à appréhender, même pour ceux ayant apprécié Vheissu : sourdine, clavier étouffé, effets multiples, influences électroniques, sonorités évoquant largement le Kid A de Radiohead, laissant plus largement encore la place à la réflexion philosophique et souvent théologique du groupe, Water est un étrange voyage. On passe des abysses à la surface, de l’utérin au grand jour, de la dérive des peuples à la thématique du guide et de l’errance, tout cela sur fond de musique habitée, envoutée même, dont les 6 minutes de l’interlude « Night Diving » sont la clé de voûte. A écouter d’affilée, yeux fermés et dans le noir si possible, et bien à part de Fire, en tout cas à distinguer de la première partie du disque tant cette plongée constitue un véritable aboutissement musical de génie.

Et pourtant difficile de ne pas considérer Water, au premier abord du moins, comme le bonus, la piste cachée de 27 minutes, le délire ‘cosmico-quelque chose’ d’un groupe qui peut se le permettre, bref comme la face sombre d’une musique qu’on leur connaît mieux et qui avec les six titres de Fire à de quoi réconcilier quelques vieux fans avec les aspirations post-2003 du groupe. Fire est loin de renouer avec la chansonnette de « The Artist In The Ambulance » ou avec la vélocité des compos des débuts, pourtant il reste accessible renoue avec la technicité et la puissance, tout en étant très produit, très cohérent sur l’ensemble des six morceaux, proposant lui aussi un voyage et une histoire où une multitude de sentiments se mêlent. L’allumage se fait avec la puissante « Firebreather » et est plus que réussi, on est tout de suite dedans et là aussi l’élément feu est plutôt bien mis en évidence. Le feu qui couve sur « Backdraft », la déflagration sur « The Messenger », le feu salvateur qui peut réchauffer ou se montrer imprévisible aussi, le retour de flamme, (« The Arsonist »), les ravages, la destruction sur la monumentale « The Flame Deluge »… La chanson la plus accessible du disque est sans doute « Burn The Fleet » au refrain viscéral et plein d’émotion, le genre de morceaux fédérateurs et inspirés sans être grandiloquents qui auraient eu sa place sur Vheissu.

Un disque de cinquante minutes difficile à cerner donc, c’était prévisible et un peu le principe certes mais après plusieurs réécoutes et en s’en donnant la peine le pari semble en voie d’être gagné. Tant que l’ambition artistique de Thrice sera sauvée par cette sincérité là on peut être tranquille. Reste maintenant à attendre la sortie de Earth & Air…



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BIOGRAPHIE DU GROUPE


Thrice


Note : 17 / 20

Année : 2007

Durée : 50 minutes

Label : Vagrant Records

Du Son : SOUND

Tracklist :

01. Firebreather
02. The Messenger
03. Backdraft
04. The Arsonist
05. Burn The Fleet
06. The Flame Deluge
07. Digital Sea
08. Open Water
09. Lost Continent
10. Night Diving
11. The Whaler
12. Kings Upon The Main