Interview avec The Twisted Minds

Date de publication : 17 avril 2007
Rencontre avec Alex Harlé (guitare) et Nicolas Mollin (chant, guitare), des Twisted Minds, pour une interview post-excellent-concert ce mercredi 11 avril 2007. Quinze jours avant le premier tour des élections présidentielles, les Annecéiens nous font part de leur peur d’un éventuel second tour Sarko-Le Pen. Ils nous donnent aussi un peu plus d’informations sur leur nouvel album, "Neo Dogmas", sorti quelques jours plus tôt. Et tant qu’on tenait Alex, on lui a demandé où en était son label, Youth Way Records, et s’il pensait reformer Against You, le groupe de ses débuts avec qui il a refait un concert... Résultat : quarante minutes de rushes pour une longue, mais très intéressante interview.

Votre nouvel album, "Neo Dogmas", n’est pas encore dans les bacs. Vous pouvez nous en dire un peu plus sur cet album. A quoi s’attendre ?

  • Nicolas Mollin : On voulait faire un album dans la lignée du précédent. Mais apparemment, pas mal de gens nous disent que notre musique à beaucoup changée. On a gagné un peu en efficacité, on a des riffs plus gros. C’est un peu moins punk melo. J’ai réécouté le premier et c’est vrai que ça sonnait très NoFX, Propagandhi. On a certainement un peu plus de couilles maintenant.

Vous avez des influences très diverses, du punk melo au metal, en passant par le hardcore. N’est-ce pas difficile de regrouper ces influences pour en faire une musique concise, sans que ça parte dans tous les sens ?

  • Nico : On essaie pas de mettre toute nos influences dans notre musique. On essaie de faire un truc cohérent.
  • Alex Harlé : Twisted Minds est comme une éponge, il y a différents styles qu’on a absorbé et après on en presse le jus pour avoir notre son. Et c’est cool que chacun apporte ses influences. Je fais des compos heavy pour m’amuser...
  • Nico : J’écoute beaucoup de hardcore mais je joue des trucs acoustiques... Et le bassiste a une troisième jambe ! Alex : Ouais. Il a une grosse bite, mais ça n’influence pas les compos...

On vous a souvent assimilé à Propagandhi, notamment par rapport au côté technique de votre musique et aux textes engagés. Est-ce vraiment une forte influence pour vous ou est-ce juste une coïncidence ? En tout cas c’est plutôt valorisant...

  • Nico : Ouais. Je ne sais pas si c’est une bonne chose ou pas. J’accepte avec plaisir la comparaison d’autant plus que Propagandhi sont nos idoles ultimes. J’adore ce groupe, sa démarche. Il reste totalement authentique à 100%. C’est mon groupe préféré, forcément les influences se ressentent. Propagandhi m’a éduqué musicalement, j’ai écouté ses albums un à un. Donc c’est pas une mauvaise chose. Mais je pense que notre musique s’en détache de plus en plus.
  • Alex : En fait, les points communs qu’on a avec Propagandhi, c’est le côté punk rock politique et cette vision d’aborder le punk rock de manière un peu différente.

Propagandhi a fait appel à un second guitariste, vous aussi il y a quelques temps. Vous n’avez pas l’impression qu’ils vous copient ?

  • (rire général) Nico : Si. D’ailleurs j’ai appelé Chris, je lui ai dit que c’était cool et qu’il devrait prendre un guitariste aux cheveux longs, au look un peu metal et qui écoute du Edguy...
  • Alex : Et qui fait plein de pain pendant les concerts. Qui monte sur les baffles et qui se rend compte après qu’il ne pourra jamais sauter sur la scène depuis la baffle ! (rires)

Et pour les textes, qu’est-ce qui vous a inspiré pour ce nouvel opus ?

  • Nico : C’est Clément (batteur) et moi qui écrivons les textes. Après il y a eu quelques débats entre tous les membres du groupe sur certains thèmes où on n’avait pas tous le même avis. On lit pas mal de livres politiques, contre la consommation, et on s’en inspire. On s’inspire aussi pas mal de la scène punk et de la scène hardcore, de l’actualité aussi, des problèmes sociaux qu’on a rencontré avec le dernier gouvernement. On a voulu anticiper les élections avec des chansons qui traitent des émeutes des banlieues de 2005, du projet de loi visant à faire apprendre la Marseillaise à l’école. Le sujet est d’ailleurs revenu dans la campagne avec le débat sur drapeau national et tout...
  • Alex : Dans le groupe, on est tous à gauche. Mais on ne votera pas tous pour le même candidat...

Donc vous avez un peu les boules avant ces élections, comme beaucoup de gens d’ailleurs ?

  • Nico : Ouais c’est clair ! Sarko - Ségo, c’est horrible. Bayrou au milieu, c’est pas beaucoup mieux.
  • Alex : Après s’il y a un Sarko - Le Pen au second tour, je quitte la France !
  • Nico : A la limite, je préfère rester et participer aux émeutes...
  • Alex : Ouais, mais les émeutes ça ne changera pas grand chose. Ils vont t’envoyer les CRS et voilà.

Pour revenir à l’album, comment s’est déroulé l’enregistrement de "Neo Dogmas" ?

  • Alex : La batterie a été enregistrée en deux jours au NSR studio avec Laurent Nafissi pour quatorze titres. On avait prévu quatre jours et Clément (batteur) l’a faite en deux. Et après on a fait quinze jours de prise de son chez Rémi, de Freygolo. Par pêché d’orgueil, on pensait en avoir pour huit jours de prise de son, et en fait ils nous en a fallu quinze.
  • Nico : Finalement Rémi est beaucoup intervenu dans l’enregistrement. Par exemple pour la voix, il m’a vraiment drivé.
  • Alex : On s’y est pris complètement à l’arrache pour trouver quelqu’un pour l’enregistrement. Du coup, on pensait que Rémi allait juste appuyer sur "rec" au début et réappuyer à la fin. Et en fait il s’est vraiment investi dans le processus. Il a su nous guider, il a su nous dire quand c’était pourri. Il a vraiment donné un avis artistique. Il a fait au moins six versions du mix. Il a passé trois mois sur cet enregistrement au final.

C’est pour cette raison que l’album a mis du temps à sortir ?

  • Nico : Ouais en effet. L’enregistrement a commencé en juillet, il a fini en août. Le mixage a fini en octobre et le mastering en février.
  • Alex : Le mixage a pris du temps. Parce qu’en fait quand tu commences à mixer, t’as du mal à arrêter. T’as toujours un truc à redire. Donc à un moment il faut savoir dire stop et se reconcentrer sur l’esprit du départ.
  • Nico : Mais finalement c’est pas plus mal que ça ait duré plus longtemps que prévu. On ne voulait pas un son trop brut, on voulait vraiment faire une oeuvre finie et cohérente. Quitte à faire le prochain plus brut. Donc on n’est pas mécontents d’avoir pris notre temps.

Et quels sont les projets après cette tournée française ?

  • Alex : En septembre on a une tournée en Allemagne. Parce qu’on a l’opportunité de distribuer nos cds en Allemagne, en Suisse et en Autriche. Et l’album sort justement en septembre dans ces trois pays. Donc une tournée là-bas avec des gros groupes de la scène hardcore européenne.
  • Nico : Avec les Satanic Surfers normalement, mais ils ont splitté. Le jour où j’ai appris qu’on devait tourner avec eux, j’ai appris qu’ils avaient splitté !
  • Alex : Dès qu’on joue là-bas c’est royal. Il y a 100 personnes qui sont devant nous à chanter nos textes !

Il y aune plus grosse scène punk rock là-bas...

  • Nico : Apparemment au niveau punk rock melo, la scène s’appauvrit un petit peu. Après il y a de plus en plus de groupes de la nouvelle scène, qui sont très lookés avec des énormes sons...
  • Alex : Mais le problème c’est que j’entends plein de groupes avec des énormes sons super-produits, et quand tu les vois sur scène c’est de la merde. C’est trop facile aujourd’hui d’avoir un gros son.

Et sinon, vous avez une nouvelle tournée au Brésil de prévue ? (Twisted Minds ont fait une tournée au Brésil en 2005)

  • Alex : Normalement, "Neo Dogmas" sort en mai au Brésil, mais c’est pas sûr. Donc on va essayer de dealer une tournée avec Streetbulldogs. Mais de toute façon on tenter d’y retourner. C’était vraiment énorme la première fois. Le truc hallucinant, c’est que sur cette tournée, tout le monde jouait avec le même matos, avec la même batterie, juste avec un line check. La seule différence entre les groupes, c’est la manière dont t’envoies sur scène. Donc sur les deux premières dates, on regardait nos amplis et on se disait "Putain, sur quoi on joue !". Et finalement c’est cool. Les groupes brésiliens n’ont aucun moyen, du coup, la seule façon de se démarquer est d’envoyer la sauce.
  • Nico : Finalement, on a eu la chance d’être sur une grosse tournée. Donc on s’est fait pas mal connaître. Comme ZSK qui avait fait une tournée en France avec Anti-Flag, et qui a eu un certain renom grâce à cette tournée.

... ouais, mais ZSK a splitté, c’est à la mode en ce moment...

  • Alex : Ouais, tiens on va splitter. Et faire une tournée de reformation (rires) !

En parlant de reformation, Alex, tu as rejoué avec Against You ? (Against You était le premier groupe d’Alex)

  • Alex : Ouais, on a fait une reformation. Mais en fait on n’avait jamais officialisé le split. J’avais commencé Against You en 1993, j’avais treize ans. On avançait plus car on ne savait pas ce qu’était un label, ce qu’était un tourneur, on ne savait rien. On était des gamins. Des types nous trouvaient des dates, on jouaient pour un pack de bières et on était content.
  • Nico : Aujourd’hui aussi on est content d’avoir un pack de bières pour jouer (rires) !
  • Alex : Ouais mais bon... Puis notre chanteur (Terence Bougdour) est devenu champion de skate en rampe. Donc il tournait partout en Europe et il n’avait pas trop de temps pour jouer. Notre batteur est parti sur Paris et il a rejoint Minimum Serious. Against You s’est terminé un peu comme ça... Et là on s’est reformé mais c’était pour le fun, à la limite on fera quelques dates pour se marrer.

On va finir avec ton label, Youth Way Records (label de Twisted Minds et The Reaction). Pourquoi et comment as-tu créé ce label ?

  • Alex : Déjà, Youth Way est totalement do it yourself. A la base c’est une association loi 1901 comme tous les labels punk rock qui se montent en France. L’objectif était d’abord de sortir nos skeuds. Puis de sortir des albums d’autres groupes. Mais pour chaque groupe il faut qu’on pose notre fric sur la table, en espérant que leurs albums se vendent sinon, après, on ne pourra plus rien faire.

Et tu étais tout seul à t’en occuper ?

  • Alex : J’étais le seul à bosser vraiment pour le label. Il y avait juste quelques personnes pour faire les jaquettes, s’occuper un peu de la promo. Mais en gros si tu ne mets pas tes tunes sur la table, tu ne fais rien. Depuis deux ans, le label était un peu au point mort. Parce qu’en fait le label avance à la vitesse où moi je bosse dessus. Avec la sortie de l’album de The Reaction, c’était l’occasion de refaire quelque chose. Avec Dani et Mosti, mes collaborateurs, on s’est mis d’accord pour monter The European Label Group. En fait, moi je suis en France et eux sont en Allemagne, et on sort des groupes indés dont tout le monde se fout mais qui nous tiennent à cœur. Du coup, les productions sortent en France, en Allemagne, mais aussi en Autriche et en Suisse. On va essayer de l’étendre à toute l’Europe comme ça. Voilà notre objectif.

A vous le mot de la fin... Qu’est-ce que vous avez à ajoutez ?

  • Nico : Dans dix jours c’est les élections donc allez voter ! Et votez à qui vous voulez, mais pas à droite (ou alors assumez les déséquilibres de ce pays).

Merci à vous et pour votre patience...

Fab et Will



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