Dropkick Murphys - The Meanest Of Times

Date de publication : 24 octobre 2007 par Seb-O-Matic

Contexte :

Que les phalanges se crispent et que la bière se remette à couler dans les gosiers, que les poings se relèvent et que les choeurs s’entremêlent au comptoir : les Dropkick Murphys sont de retour, nom d’un trèfle à quatre feuilles ! Le gang de Boston revient dans les bacs, et rarement un de ses albums aura été autant attendu, après les ventes atteintes par The Warrior’s Code, le précédent opus.

Il faut dire que la présence d’un des titres, « Shipping Up To Boston », sur la bande originale du dernier Scorsese, The Departed (’Les Infiltrés’ en VF), film au succès mondial que les filles ont aimé pour la belle gueule de Di Caprio, et que les mecs ont adoré pour cette même gueule qui se fait exploser (oups, ceux qui ne l’ont pas encore vu vont m’en vouloir…). Du coup les ventes, aux Etats-Unis notamment, s’en sont ressenties. Ce qui amène une nouveauté : le groupe ne sort pas cet album chez Hellcat, son label de toujours, mais sur sa propre structure, Born & Bred (Cooking Vinyl pour l’UE). Evidemment les puristes ont tout à coup peur que leur groupe leur échappe et devienne trop populaire, aussi beaucoup se sont montré sceptiques quant au contenu futur de la galette.

Chronique :

Et que l’on se rassure tout de suite : les Dropkick n’ont pas versé une pop amère pour troubler la mousse impeccable de leur Guinness. Toujours décidés à brailler le plus fort (et le plus vite) possible leur fierté d’appartenir à cette fameuse « working class », ils rentrent d’entrée de jeu sur les chapeaux de roue (de la fortune) avec « Famous For Nothing », au titre assez évocateur. Avec deux refrains, dont le dernier qui, s’il se fait tardif, n’en est pas moins terriblement efficace, et révélateur des thèmes chers aux Dropkick : « Their gang went my way for basketall / My gang was their way for alcohol ». Ken Casey, le bassiste bedonnant et jovial, semble accaparer le chant plus qu’à l’habitude, et n’est pas loin de chanter autant qu’Al Baar sur pas mal de chansons. En résulte une complémentarité encore plus conséquente, et des couplets qui font pratiquement office de dialogue (un peu systématique). En atteste l’excellente « God Willing », où les deux voix de pilier de comptoir se répondent de la plus belle des façons.

Il semble y avoir deux périodes dans la démarche musicale des Dropkick Murphys : une période pré-Blackout, et donc une post-Blackout. Depuis ce - très bon - album charnière, les instruments traditionnels qui font la particularité du groupe sont parfaitement incorporées aux compositions, et viennent embellir la mélodie tout en conservant une énergie keuponne. Ce qui n’a pas changé, et tant mieux, ce sont les thèmes abordés. Les conflits sociaux, problèmes personnels et autres soirées de cuite sont toujours les thèmes de prédilection du combo. Pas de risque de les voir se mettre à chanter sur leur nouvelle voiture ou leur nouvelle maison avec piscine dans chaque pièce… Fidèles à la tradition orale irlandaise, consistant à raconter les moindres faits et gestes comme s’il s’agissait d’une véritable légende, les Dropkick offrent une nouvelle fois avec ce The Meanest Of Times un recueil de nouvelles rurales, et une galerie de personnages des plus réalistes. Comme sur « Never Forget », où les valeurs familiales sont exacerbées : « When you’ve got love, you’ve got family ».

Cette fameuse working class dont ils veulent se faire, sans prétention aucune, l’un des porte-paroles, ne peut qu’adhérer à la bourrinade de « Tomorrow’s Industry ». Les mélodies semblent décuplées, chaque refrain restant en tête dès les premières écoutes, grâce à des arrangements impeccables (« I’ll Begin Again »).
Il fallait bien une accalmie au milieu de ce déluge qui aurait fait couler l’embarcation de Noé, ça sera donc « Fairmount Hill », qui veut se la jouer ballade folklorique inspirée du vert pays, mais la chanson ne parvient à aucun moment à se faire passionnante. On connaissait déjà Al Baar dans ce registre et on l’a connu plus pondérant.

« Loyal To No One » est dans la pure veine du Dropkick des années 2000, tandis que « Rude Awakenings », non seulement parle à tous les amoureux de la bouteille, mais en plus surprend par sa coupure en deux rythmes différents, assez jouissive. Et que dire de « Flannigans Ball », adaptation d’un hit des mythiques Dubliners, avec en feat. (ça veut dire featuring pour les non-initiés à MTV) ni plus ni moins que Spider Stacy des Pogues et Ronnie Drew des Dubliners. Celui-ci s’investit particulièrement dans la mise en place de la chanson, allant jusqu’à se déplacer en studio à Dublin avec les Dropkick pour leur montrer comment la chanter, malgré la perte très récente de son épouse. Et le résultat vaut le déplacement : apprêtez-vous à danser une gigue bien bordélique dans votre salon ! « Johnny I Hardly Knew You » semble ressusciter l’hymne des confédérés dans une ambiance très proche de la piraterie, son refrain flirtant avec d’autres du genre « hey oh ! Hey oh ! et une bouteille de rhum », assez jovial pour faire oublier des paroles proches du néant. (« Drums and guns and guns and drums » etc, on dirait du Superbus…)

Au milieu de toute cette déflagration sonore, on aura apprécié la place plus importante accordée au banjo, comme sur le hit « The State Of Massachussets », sans doute le morceau au plus gros potentiel tubesque jamais écrit par les bostoniens. Une intro au banjo avec un petit riff qui risque de rester un sacré bout de temps dans un coin de nos têtes, une histoire encore une fois sociale sur des enfants dont la mère ne pouvait plus s’occuper et qui sont récupérés par la DASS locale… Un refrain aussi efficace pour se mettre à brailler que 15 pintes de bière avalées en un quart d’heure. Un excellent morceau au milieu de très bons et d’autres simplement bons. La formule des Dropkick Murphys est désormais parfaitement rôdée, et si elle garde le cap vers l’horizon dessiné depuis Blackout, sa vitesse de croisière et sa puissance à voguer sur les flôts (de bière) se font de plus en plus impressionnantes.



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BIOGRAPHIE DU GROUPE


Dropkick Murphys


Note : 17,5 / 20

Année : 2007

Durée : 45 minutes

Label : Born & Bred Records

Du Son : SOUND

Tracklist :

01. Famous For Noting
02. God Willing
03. The State Of Massachusetts
04. Tomorrow’s Industry
05. Echoes On “A” Street
06. Vices & Vertues
07. Surrender
08. Flannigans Ball
09. I’ll Begin Again
10. Fairmount Hill
11. Loyal To No One
12. Shattered
13. Rude Awakenings
14. Johnny, I Hardly Knew You
15. Never Forget
16. Jailbreak (bonus track)