Young Livers + Bridge & Tunnel + Desecrator + Demokrathia @ Le Parvis (Bagnolet - 93)

Publié le 17 avril 2010 par Seb-O-Matic

C’est la fête à Bagnolet ce samedi ! La gare routière internationale est en effet prise d’assaut par des hordes de touristes bloqués au sol par un nuage de cendres islandais qui risque de faire tomber Eric Besson en dépression (comment tenir les quotas sans charters ?). Le fameux Parvis, improbable bar coulé dans le bitume entre deux tours commerciales, accueille pour sa part une population pour le moins hétérogène. Punk à Vans, punk à jeans, punk à chiens, punk à vomi… Il y a de tout ce soir, ce qui s’explique par la salle, mais aussi par l’affiche.

Abject/Object est déjà passé, et sur le carrelage du bar, c’est la petite curiosité de la soirée qui est en train de sévir : les algériens de Demokrathia. Ils s’empressent de préciser que les vidéos prises ce soir ne doivent pas être mises sur Youtube. Mais là ce n’est pas parce que les vidéos sur Youtube c’est fondamentalement moche et inutile, mais surtout parce qu’ils n’ont pas trop le droit de faire ce genre de musique et de raconter ce qu’ils disent dans leur contrée. Ceux qui ont eu la bonne idée d’aller voir le film « Les Chats Persans » comprendront facilement le délire. Pas mal de monde est venu pour eux apparemment, l’exotisme aidant sans doute. Musicalement, la formule est très, très répétitive, avec un hardcore à deux chants façon ping-pong qui fait que tous les couplets sont les mêmes, et un break du genre mosh-part plutôt cool et bien amené. Le set est court, ponctué entre chaque chanson d’une explication de texte (ils chantent dans leur langue natale). Ainsi on apprend que le Ministère des Anciens Combattants de la Guerre d’Algérie a un budget équivalent à celui de l’Ecole ou de la Santé, et que certaines personnes qui en perçoivent une pension ont moins de 40 ans. La guerre d’Algérie, c’était au début des années 60 hein… Voilà qui aura au moins eu le mérite de remettre les choses dans leur contexte : on se plaint souvent du manque de moyens à notre disposition en France pour faire exister la scène underground. Il faut se rappeler qu’il y a toujours pire ailleurs. De chaleureux applaudissements pour leur dire au revoir, mais voilà que le groupe algérien déclare faire un autre concert ailleurs dans la soirée. Pas très cool pour les trois groupes qui doivent passer après et pour l’orga…

C’est un groupe parisien qui prend le relais, Desecrator. Les gars font du fast grind, et il faut aimer le genre... Ah ça, l’affiche est aussi éclectique que la foule ce soir, plutôt âgée (moyenne de 30 ans). Dehors certains keupons de la rue ne semblent être venus que pour boire des coups et promener leurs chiens, ils ne rentreront pas dans la salle de toute la soirée.
Dedans c’est au tour de Bridge & Tunnel d’apporter un peu de finesse dans ce monde de brutes (le groupe compte dans ses rangs des ex-Latterman, ça pose). La guitariste-chanteuse est assez hallucinante, avec une avalanche de riffs planants se superposant à la rythmique surpuissante distillée par le batteur. A grands coups de titres tirés de leur très bon opus « East / West » et de leur batterie d’EPs, le groupe américain parvient à faire secouer les têtes des quelques dizaines de personnes restées à observer. C’est que la salle se vide au fur et à mesure de la soirée...
Moins frontale que les groupes précédents, la musique du groupe de No Idea peut être difficile à appréhender pour le néophyte. Pourtant c’est un régal, les deux voix se répondant parfaitement (malgré un son pas toujours généreux), et les riffs de gratte se succédant comme des joueurs de l’équipe de France de football sur une prostituée mineure... Pas mal de connaisseurs, souvent venus de Normandie pour le concert de la veille de la même orga, en profitent eux pour en prendre plein les mirettes et les boîtes à décibels. Le set se termine très rapidement, mais permet ainsi au combo de ne pas devenir lassant à force de gimmicks très similaires.

Le stand de merch composé à 90% de vinyles, ne désemplit pas depuis le début de la soirée, et les collectionneurs dégainent les liasses pour compléter leurs discothèques, tandis que les 4 costauds de Young Livers se mettent en place. Il ne faudra pas plus d’un titre pour mettre tout le monde d’accord. Le punk/hardcore taillé pour le sing along de ces fous furieux venus de Gainesville, Florida, fait adhérer tous ceux qui sont restés, et en fait même revenir quelques-uns. C’est samedi soir, et certains sont déjà bien imbibés. On retrouve du coup une espèce d’ersatz d’embryon de début de pogo, avec trois mecs bourrés qui sautent sur place avec un grand sourire, ou se prennent par les épaules pour être plus forts et bousculer les faibles gens qui ne font qu’observer. Ah les kids… ah bah non tiens, pas kids du tout, ces trois-là sont entrés dans une bonne trentaine, pour ne pas dire un début de quarantaine. Qu’ils y restent et leurs foies avec.

La chanteuse de Bridge & Tunnel a beau être en tournée avec les Young Livers actuellement, elle reste au premier rang pour regarder la prestation toute en sueur de ses copains, qui mouillent vraiment le maillot. Là encore les voix se répondent, mais pas de trace de finesse mon gars. Les deux gars, bassiste et guitariste, ce sont deux bons gros bûcherons, à la voix rauque et grave. C’est une grosse débauche d’énergie, mais aussi de mélodie. Le catalogue No Idea est décidément rempli de petites pépites. Le public ne s’y trompe pas et réclame une chanson supplémentaire dès la courte demi-heure de set écoulée. On a dépassé l’horaire prévu, mais le patron se montre indulgent et laisse faire. Pas folle, la guêpe. Ah si seulement ce nuage avait pu rester dans les airs, et bloquer ce genre de groupes dans nos contrées…