Crazy Arm + Bangers + IDS @ le Pixi (Bagnolet - 93)

Publié le 22 février 2010 par Seb-O-Matic

Ah Bagnolet ! Tout y sent bon la déglingue. Le Rocher de Malakoff ayant succombé, c’est le Pixi de Bagnolet qui s’impose comme la nouvelle salle de banlieue « in » pour les concerts du genre alternatif, du genre qui fait du bruit, du genre qu’il devient de plus en plus difficile de caser dans la capitale. Mais bon, certaines affiches valent quand même le déplacement, ce qui semble être le cas ce soir. Organisé par Elephant Booking (un français qui vit à Londres est derrière tout ça), le concert est annoncé à 19h. En langage parisien, ça veut dire que ça commencera véritablement à 20h00. Du coup ça laisse le temps de passer par la maison, délaisser les chaussures en cuir rigides pour les Converse qui vont bien, le pantalon noir pour le jean troué, de passer quelques coups de fil d’insultes à des personnes choisies au hasard dans l’annuaire, et d’oublier de manger un bout.

Arrivée à 19H55. Théoriquement, c’est parfait. Le temps de commander la première bière, de dire bonjour, et… ah mais bordel c’est pas commencé du tout là ! Et ils sont où les gens ? Chez eux apparemment, la soirée se contentera d’une trentaine d’entrées au final. Pas génial, mais le nombre permet toutefois de bien meubler la petite salle du bas du Pixi. C’est finalement à 20H30 que les IDS commencent leur set. Les locaux de la date ont bien appris leur leçon de Guerilla Poubelle. Pas question de dresser des barricades dans les rues pour renverser un gouvernement, mais de punk rock en français. Quatre accord, des riffs de temps en temps, une rythmique « tac-tac-tac-tac » (précision technique pour les connaisseurs), et un chant alternant entre le chanté normal mais fougueux et les cris du type « je suis un cochon en train de se faire sodomiser ». La formule commence à être rôdée, il ne reste qu’au jeune groupe à digérer ses influences. Reste que tous leurs copains venus ce soir s’amusent bien, mais pas trop. C’est qu’il est encore tôt, et que le son n’est - comme d’habitude ici - pas bien folichon.

Rapide changement de « plateau », et ce sont les english de Bangers qui viennent foutre une bonne claque à tout le monde. Pour situer le niveau du groupe, prenons deux éléments en compte :
¤ Primo : le t-shirt du bassiste, « The Fest ». The Fest, c’est le meilleur festival punk du monde, organisé par No Idea, avec tous les groupes de punk rauque qui comptent (Hot Water Music, Against Me !, Strike Anywhere, The Flatliners, tout le catalogue No Idea et tout ça…). Bon oui et alors, c’est qu’un t-shirt ? Oui mais Bangers, ils y ont joué, au Fest, en 2009.
¤ Secondo : la distro du groupe. Déjà qu’ils ont le bon goût (et même la classe, allez) de n’avoir que des vinyles en vente, ceux-ci témoignent de leurs influences, et il n’y a que du lourd ! Hot Water Music, Lawrence Arms, Dillinger Four, The Arteries, Off With Their Heads et cie…

Voilà, ces deux éléments donnent une bonne idée du genre qu’affectionne le groupe, et en plus ils le font bien. Parce qu’il y a beaucoup de gens qui aiment faire l’amour par exemple, mais il y en a pas mal qui s’y prennent comme des manches. Eux font les deux, et même si la voix est bien trop faible dans cette salle à l’acoustique aussi déplorable que celle des toilettes d’une gare routière du Nord-Pas-de-Calais, on ne peut que constater l’énergie de leurs compos, avec tous les refrains qui rentrent aussi bien dans maman que papa, choeurs à l’appui et batteur qui tape comme un sourd derrière. Le set est plié en même pas dix chansons et un tout petit peu plus de 20 minutes. C’est que le trio n’a pas encore une discographie de folie (que des splits), et qu’il est toujours dur de communiquer sans parler la langue, malgré les efforts du guitariste-chanteur. Mais bon, la bonne humeur est là, et les Bangers semblent bien contents de leur premier passage à (presque) Paris. Vivement la prochaine fois.

En parlant de prochaine fois, la tête d’affiche de ce soir, Crazy Arm, reviendra déjà le 9 avril à Paris. A la Boule Noire, en première partie de Frank Turner. Là aussi, ça permet de situer un peu le niveau des anglais. Mais là aussi, le son inéluctablement trop fort vient un peu gâcher un set qui pourtant envoie du lourd. Bénéficiant de plus d’arrangements (avec notamment des riffs du genre country), la musique de Crazy Arm est encore plus desservie que celle de Bangers par la voix trop noyée dans le déluge sonore. Car il s’agit bien de déluge, tant les chansons du groupe sont massives. Le public ne s’y trompe pas, et le pogo s’en donne à cœur-joie, tout comme le groupe, sourires vissés jusqu’aux oreilles.
On ressent bien la puissance du combo, mais sans le chant pour faire le lien et renforcer la cohésion, leurs compos peuvent sembler un peu bâtardes, passant d’un genre à l’autre. Ainsi une chanson très heavy peut succéder à une très ambiance « je suis un marin condamné à manger du poisson pané dans la cale de mon bateau amarré à Saint-Brieuc », avec un chant lorgnant même du côté de… Bertrand Cantat. Ces quelques considérations s’effacent bien vite devant l’intensité et la bonne humeur des Crazy Arm, qui sont finalement aussi désolés que le public de ne pas pouvoir faire de rappel (il est trop tard). Une prestation musclée bien alléchante avant de les revoir avec Frank Turner donc.

Le temps de dépenser quelques florins en jolis vinyles (après une expédition à la recherche d’un distributeur dans les rues de Bagnolet, où chaque coin de rue avec son bar PMU donne lieu à une scène sordide), et c’est la fin de la soirée. De jolies découvertes, et des groupes qui oui, méritaient vraiment le déplacement.