Dear Landlord - Dream Homes

Publié le 7 janvier 2010 par Seb-O-Matic

Contexte :

Le catalogue du label indépendant No Idea est décidément plus excitant que n’importe quel calendrier FHM. Depuis Gainesville, le bastion du punk à la voix rauque a beau voir ses plate-bandes se faire piétiner par Fat Wreck depuis quelques années (Against Me !, Banner Pilot, The Sainte Catherines, ça change de l’époque punk à roulettes), il continue de distribuer quelques baffes chaque année. La preuve avec ce premier opus de Dear Landlord, nouveau supergroup au casting aussi bandant qu’un Tarantino : deux Copyrights et deux ex-Riverthead (dont un Off With Their Heads). Les acteurs sont prometteurs, les teasers (deux splits parus en 2007) carrément alléchants, et la pochette plutôt jolie. Alors on s’installe confortablement, on appuie sur « Play », et là, c’est le choc...

Chronique :

« I Live in heeeeeelllll ». Et voilà. Une phrase, deux secondes de lecture, et déjà les conduits auditifs sont accros. Une première ligne de chant aussi addictive que la première cigarette, la première gorgée de bière (si chère au plus doué des Delerm), ou la première étreinte dans les toilettes du collège expérimental Frédéric Beigbeder (pendant 8 minutes à la récré avec sa prof d’arts dramatiques).

« Dream Homes » débute avec une intensité remarquable, et celle-ci ne va jamais retomber durant sa toute petite demi-heure de durée de vie. Toutes les séquences sont des climax, il n’y a pas de plan de coupe, et à la réalisation, Jacques Wait, déjà responsable de la boucherie « From The Bottom » par Off With Their Heads, dirige à merveille ses protagonistes.
Les titres s’emboîtent aussi bien que papa dans maman, en atteste la paire « Park Bench » / « Goodbye To Okland », qui permet d’instaurer un crescendo sublime, en combinant la finesse d’un petit riff à la puissance des accords, puis une poussée rythmique du plus bel effet. Les effets spéciaux ont été laissés dans les tiroirs.

Tout ici transpire la sueur, l’urgence. La pop-punk est déclinée dans le sens le plus noble du terme, avec des titres comme « Whiskey & Records » (co-écrit avec les Salteens), qui évite tous les clichés, et ce grâce à l’apport de chaque chanteur.
Le calcul peut paraître simple, mais le fait qu’il y ait trois chanteurs dans Dear Landlord semble en effet conférer au combo trois fois plus de puissance. Bien qu’ayant des timbres assez proches, Zack, Brett et Adam sont parfaitement complémentaires, et c’est une véritable déferlante à laquelle on assiste sur « High Fives » par exemple, avec des choeurs bien sentis et des voix qui se répondent.

Tout cela permet de donner une grosse patate à des chansons écrites par Brett (guitare-chant) et Brad (batterie), aux propos assez sombres ou désabusés. Le punk mélancolique de la sublime « Landlocked » est d’ailleurs totalement au service d’un texte qui sent bon la dépression : « Maybe tomorrow, might be tomorrow, everything won’t be so terrible and desperate / Wait til’ tomorrow, wake up tomorrow, you won’t be miserable and looking for an exit ».
Mais au milieu de toutes ces histoires de mecs qui vivent dans des sous-sols sans fenêtres, qui sont réveillés par des policiers alors qu’ils décuvent sur un banc public ou qui attendent que leur coup d’un soir les rappelle, on retrouve un peu d’espoir, grâce à toute l’énergie dispensée sur les refrains, comme sur celui de l’incroyable « Three To The Beach », véritable petite bombe parmi toutes ces ogives. 2 minutes et 26 secondes sur des chapeaux de roue avec à la clé un break somptueux (un nouveau crescendo rythmique avec un bataillon de chœurs qui butent) et donc ce fameux chorus à l’efficacité instantanée, clamant « We’re not that hopeless, we’re not as fucked as you think / In short live moments we can do anything ». Et parmi ces courts moments où les Dear Landlord parviennent à faire tout ce qu’ils veulent, ceux où ils composent doivent être en tête de liste !

On ne s’ennuie jamais durant les 14 titres de « Dream Homes », se délectant de « Last Time I Checked », très proche des cousins pas éloignés de Off With Their Heads, de la jolie « Rosa », ou de la petite merveille « A World We Never Made », seul titre dépassant les trois minutes et achevant l’album sur une démonstration de maîtrise. Les voix se font la course, les riffs déboulent comme des bisons dans la prairie, et le baroud d’honneur consiste en une montée rythmique émotionnelle du plus bel effet.

Bien qu’il s’agisse d’un premier album, on ne peut même pas parler de révélation, tant la formation suscitait d’espoirs. Mais les quatre mousquetaires parviennent à s’imposer d’emblée comme l’un des tous meilleurs groupes actuels du genre. Et le seul reproche que l’on puisse faire à cet opus, c’est qu’il va être foutrement compliqué d’en décrocher et d’en laisser un autre s’approcher de sa platine !


Infos

Note : 19 / 20

Année : 2009

Durée : 28 minutes

Labels : No Idea Records

Tracklist :

01. I Live In Hell
02. Rosa
03. High Fives
04. Lake Ontario
05. Landlocked
06. Doormat
07. Three To The Beach
08. Park Bench
09. Goodbye To Oakland
10. Last Time I Checked
11. Whiskey & Records
12. Lost Cause
13. Begging For Tips
14. A World That We Never Made


Groupe associé
Dear Landlord