Guttermouth - Teri Yakimoto

Contexte :

Ce troisième album de Guttermouth est le deuxième à paraître sur Nitro Records, le label de Mr Dexter Holland. Le bassiste originel, Clint Weinrich, a été remplacé par le jeune Stever Rapp et le groupe d’Orange County a également rendu son punk hardcore plus mélodique. Sinon, peu de changement pour cet opus sorti en 1995, toujours autant rempli de provoc et d’humour bien gras mais non dénué de contestations et de critiques sociétales...

Chronique :

Ne nous arrêtons pas sur la pochette affreusement moche de ce cd et intéressons-nous plutôt tout de suite à son contenu. Au programme, quinze morceaux pour quarante minutes de punk rock made in California. Du pur punk rock américain, en effet, car le groupe semble avoir quelque peu délaissé son punk hardcore à la The Adolescents pour ce troisième « long jeu ».

Plus de mélodies donc, mais toujours un rythme soutenu et quelques passages bien énervés. La construction reste par contre des plus basique : couplet/refrain/pont. Mark Adkins braille moins qu’auparavant, ou que par la suite sur Gorgeous et Eat Your Face. Mais le frontman déjanté possède toujours cette voix nasillarde rappelant notamment beaucoup le gros Michel sur ses premiers albums avec NoFX. Le chanteur de Guttermouth utilise également peu sa voix totalement délirante, ce qu’il fera d’avantage sur les prochaines productions. Et si le groupe a ajouté plus de mélodies, sa musique n’est pas encore très enjouée, excepté un peu en fin d’opus, où le groupe semble avoir retrouvé le sourire.

Cependant, même si le quintet joue parfois à un tempo élevé et d’autres fois à rythme moins effréné, même s’il intègre ça et là quelques petits soli (« Generous portions ») ou autres intros de basse sympathiques (« Teri Yakimoto »), son punk rock mélo est vraiment simpliste et un peu redondant. Notamment le jeu de batterie, tellement monotone qu’il en devient même chiant si vous avez le malheur de vous concentrer dessus. Les chœurs sont également utilisés trop parcimonieusement. Il faut quasiment attendre le huitième morceau, « Gods kingdom », pour relever la tête et être réellement emballé. Un titre d’ailleurs plus énervé, au chant plus arraché, avec un break vraiment percutant. Le début de cette galette n’est pas mauvais, mais un peu trop bateau. Et après les deux premières très bonnes chansons, l’album a tendance à s’essouffler progressivement, jusqu’à ce huitième titre donc.

Finalement, les Américains redressent la barre en fin d’opus, variant un peu plus leur style. Les back vocals sont plus nombreux et quelques incartades légèrement plus enjouées nuancent la musique du combo. Les passages mid-tempo alternent plus souvent avec des interludes beaucoup plus violents, à la limite du punk hardcore, comme sur « I saw the light » et « 1-2-3-4 ». D’ailleurs, le titre de cette dernière vient du fait que la chanson soit « découpée » en quatre parties distinctes : "Give me a gun", "Food for thought", "Gar-Bage (gar’bij), a perfect example of uninteresting poetry" et "Up your bum". La quatrième section comprenant par ailleurs de superbes relents street punk.

Au final, on ressent encore un manque de maturité et d’identité qui viendront quelques années plus tard. Le groupe californien joue un punk rock simple et plutôt efficace mais pas assez original pour réellement nous faire chavirer. Un cd peut-être un peu long aussi, une dizaine de minutes en moins et l’album aurait gagné en puissance. Pourtant, on dénote déjà de bonnes choses. Notamment une voix ne demandant qu’à s’émanciper, de bons riffs entraînants ou encore cette capacité à mixer hardcore rugueux et punk rock enjoué, comme sur cette très bonne fin d’opus.