Guttermouth - Gorgeous

Contexte :

Cet album marque un tournant dans la carrière de Guttermouth, et ce à plusieurs égards. Tout d’abord, il sort en 1999, tout juste dix ans après la création de groupe. Ensuite, Gorgeous est le quatrième et dernier LP des Californiens à paraître sur Nitro Records, le désormais célèbre label de Dexter Holland (The Offspring). Enfin, le quintet s’éloigne nettement du côté pop punk de ses précédentes productions pour se rapprocher d’un punk hardcore rappelant les débuts du groupe. Un bref retour aux sources, puisque la bande à Mark Adkins se tournera de nouveau vers un son plus pop par la suite.

Chronique :

Le groupe d’Orange County renoue donc avec son pendant le plus hardcore sur cet album énervé et rapide aux rares sonorités plus popysantes. D’ailleurs, le quintet attaque à fond de cale avec « Hit machine », titre ultra efficace et entraînant, laissant présager le meilleur pour la suite de l’opus. On retrouve ce son de gratte si particulier, très distordu mais pas gras pour un sou, et surtout la voix de gamin arrogant de Mark Adkins, une voix un peu nasillarde et paradoxalement souvent écorchée. Le groupe enchaîne pied au plancher avec des morceaux tous plus entraînants les uns que les autres. La structure des chansons est dans une veine punk rock pur jus, à savoir : couplet/refrain/pont. Quelques palm mute, mini soli et autres chœurs viennent agrémenter la musique du combo qui privilégie assurément l’efficacité grâce notamment à des riffs tout simplement géniaux.

Le groupe oscille pendant une demi-heure entre punk rock californien à la NoFX et hardcore oldschool rappelant The Adolescents ou encore The Descendents. Mais le point fort de Guttermouth est sans aucun doute son côté complètement barjo que l’on retrouve sur certains titres, comme « Encyclopedia brown » ou « Diamond studded bumble bee » sur lesquels le chanteur prend de temps à autre une voix totalement débile. Ce penchant pour la connerie (que l’on retrouve d’ailleurs dans les textes) procure à la musique du groupe un aspect assez enjoué, bien que cela ne soit qu’en partie vrai sur cet opus. En effet, certains titres de Gorgeous sont très énervés (« A date with destiny ») et à des années lumières du punk rock popysant d’un Gusto par exemple. Cependant, même en étant plus bourrins, les trublions gardent toujours leur humour gras et leur sarcasme sous le coude. En témoigne « Diamond studded bumble bee » qui alterne joliment passages bien énergiques avec une voix braillarde et moments beaucoup plus joyeux.

Finalement, Guttermouth a toujours cultivé ce paradoxe entre hardcore oldschool assez violent, riffs rentre-dedans, rapidité d’exécution et cette voix parfois très enjouée, ces mélodies lorgnant vers le pop punk, ces chœurs très joyeux. Si Gorgeous affiche clairement le versant le plus hardcore des Ricains, le groupe n’est néanmoins jamais tombé dans du gros hardcore de méchants, ni à l’inverse dans un pop punk à la Blink ou à la Green Day. Le quintet version mélo s’approchant plus d’un NoFX, comme sur les deux derniers morceaux de cet album.

Un cd qui ravira sûrement les fans de la première heure et qui, a contrario, pourra désarçonner l’auditeur ayant découvert le groupe via Gusto ou Shave The Planet. Peut-être pas l’album le plus accessible de Guttermouth de part son agressivité, sa vigueur, mais, pour moi et en totale subjectivité, sans doute l’un des meilleurs opus du groupe.