NOFX + The Loved Ones + Tat @ Brixton Academy (Londres)

Date : 4 novembre 2007 par Seb-O-Matic

Ah !!! Voir NOFX en concert... Fantasme adolescent qui semblait condamné à rester aussi irréalisable qu’une soirée Jacuzzi avec Natalie Portman et Alizée, vu le manque d’entrain du groupe à vouloir passer par notre petit pays de fromages qui puent. Obligé donc d’aller passer un peu de bon temps au pays où commander une pinte n’exige pas l’ouverture d’un nouveau crédit, mon Dieu que de contraintes ! Dans la journée on aura constaté à quel point la privatisation du métro était bénéfique, avec ses tickets à 4 livres pièce (6 euros) et la ligne Victoria Line, qui emmène à la salle, interrompue toute la journée. Il faudra donc prendre le bus pour se rendre à la fameuse salle de concert, où tout un tas de punk-rockers est désormais rassemblé. Le pub d’à côté, le « Backstage », est archi-bondé, et a mis sur le trottoir une affiche « NOFX on stage at 21 :30 ». En gros : « venez vous mettre une murge ici avant d’aller au concert ». Ceci explique sans doute pourquoi tous les anglais n’ont besoin que d’un simple t-shirt pour se sentir assez chaudement vêtu alors qu’il ne fait que 7-8 degrés…

L’intérieur de la salle est très impressionnant : elle est aménagée en pente, ce qui permet à tout le monde, même au fond, de pouvoir voir ce qu’il se passe sur scène. Au-dessus de la scène des ornements style théâtraux donnent une touche de « classe » à l’endroit. La salle doit bien contenir dans les 4000 personnes, impensable en France de voir un tel concert rassembler autant de monde. Toutes les tranches d’âge semblent bien représentées ce soir, avec tout de même une majorité de 20-25 ans. En première partie on retrouve Tat, trio pop/punk avec chanteuse brune bien foutue qui doit savoir avec qui fricoter, puisque je les avais déjà vus en première partie de The Offspring en France. Les chansons se suivent et se ressemblent, plagient même Green Day au détour d’un refrain, et la chanteuse demande à tout le monde de chanter en chœur… Elle ne semble pas franchement au courant que personne n’est venu pour Tat et que ce n’est pas « son » concert…

On se réjouit davantage de voir The Loved Ones derrière, parce que là ça devrait quand même être plus classe ! Effectivement ça l’est, mais bon c’était pas non plus un énorme challenge à relever. Tous les sacrés bons morceaux, de « Keep Your Heart » sont passés en revue, comme le hit « 100K ». Le chanteur Dave Hause (ex-Paint It Black tout ça...) fait tomber la veste dès la fin de la première chanson (ça valait le coup de la mettre tiens !), et s’évertue à haranguer une foule qui reste assez sceptique… La salle semble trop importante pour un groupe comme The Loved Ones, qui malgré la meilleure volonté du monde et des sacrés chansons ne parvient pas à faire remuer plus que ça l’audience, qui attend impatiemment ses héros. On a le droit à un nouveau titre, pas exceptionnel mais pas dégueu non plus, et aussi l’incontournable « Jane » et ses « allright, allright » qui permettent aux quelques fans des premiers rangs de donner de la voix. Le groupe s’en va sous des applaudissements bien mérités, on attendra de revoir le groupe dans une salle plus adaptée à son statut pour se refaire une idée (le 13 novembre 2007 au Java à Paris par exemple).

Le nouveau changement de plateau est l’occasion d’un petit passage par le merch pour constater que les cds ne sont qu’à 5 livres (7,5 euros), et d’une tentative d’approche de bar avortée. Bien qu’il y ait 7-8 bars dans la salle, tous sont absolument combles, et la queue pour y accéder est effroyablement longue. On comprend mieux le nombre déjà élevé de mecs complètement bourrés… Je me résigne donc à passer un concert sans boire de bière, ce qui n’avait pas dû m’arriver depuis mes 16 ans, et me rends dans la zone photographe, puisque mon accréditation me donne le droit d’essayer de prendre des photos du concert. Me voici donc au milieu de photographes avec des appareils équipés de zooms grands comme des bras. Je dois bien avoir l’air d’un con avec mon petit appareil numérique, mais bon, faut croire que moi j’ai rien à compenser... La tension est à son maximum, les « NOFX ! » sont scandés par une foule aussi compacte qu’impatiente, et retentissent dans l’arène. On attend une entrée en conséquence, et voilà Fat Mike qui rentre sur scène comme à la maison, un verre à la main. Il n’a pas encore sa basse dans les mains mais débite déjà conneries sur conneries avec El Hefe. Ces mecs ont beau être parmi les plus moches du circuit punk actuel, ils doivent en revanche être les plus décontractés. Et quand ils se mettent à jouer, c’est tout simplement de la folie. Il faut dire que débuter avec « Dinosaurs Will Die », ça calme. A peine les premiers accords plaqués, les anglais font honneur à leur réputation de meilleur kop du monde en hurlant les paroles, tandis que Fat Mike, plutôt svelte, danse n’importe comment avec El Hefe et Melvin, un grand sourire dessiné sur chaque faciès. Deux filles se roulent des pelles sur le côté de la scène, les quatres gagmen sont ravis. Le groupe s’amuse comme aucun autre, et en plus se permet d’enchaîner tube sur tube. « Linoleum » vient tout ravager derrière, avec des paroles encore une fois reprises à la volée, suivie de « Seeing Double At The Triple Rock », pour laquelle El Hefe doit appuyer sa jambe sur les retours pour exécuter le riff.

Ça pogote pas mal désormais dans le pit, quelques slams sont même effectués malgré les consignes très strictes les interdisant, et Melvin à la gratte arpente le bord de la scène en articulant ses jambes d’une bien drôle de manière. Alors que tous les groupes de cette envergure jouent dans un décor amovible ou une immense banderole à leur effigie, NOFX nous dévoile leur banderole à eux : un ridicule bout de tissu de 20cm sur 15, suspendu dans les airs au-dessus de la scène. Tout le monde se marre, applaudit, puis exulte en entendant les premières notes de la chanson qui suit : la magistrale « The Decline », chanson à tiroirs de 18 minutes ! Ça tombe bien c’est un peu le rêve de tout fan de NOFX de la voir interprétée en concert, qui plus est en entier comme c’est le cas ce soir ! Comme sur l’EP du même nom, les chansons sont parfaitement cohérentes entre elles mais chacune se distingue. On peut donc avoir l’impression qu’il s’agit en fait d’un enchaînement de chansons, mais un détail permet d’être sûr du contraire : Fat Mike ne raconte pas de conneries entre chaque chanson... El Hefe fait péter le trombone sous les bravos de la foule, qui chante à l’unisson chaque couplet et chaque refrain de la longue tirade. Sur le final la guitariste de Tat revient prendre la guitare de El Hefe pendant que celui-ci interprète le final au trombone. La revoilà qui se trémousse partout genre « regardez-moi je suis une star, je joue avec NOFX ». Le Gros Michel ne se fait pas prier pour se rincer l’œil, et déclare lorsqu’elle part : « Pretty, pretty, pretty girl… but i don’t know her name ».

N’hésitant jamais à prendre à partie son public, le patron de Fat Wreck fait un petit tour de l’audience pour savoir de quelle confession religieuse sont ses ouailles. On constate quelques juifs et musulmans dans cette grande assemblée de protestants. L’occasion de lancer la sautillante « Leaving Jesusland ». Fat Mike précisera par la suite qu’il considère cette chanson comme la meilleure qu’il ait jamais écrite. Le groupe est sacrément bien en place et sa formule est parfaitement rôdée. La frappe à la batterie est sèche et régulière, avec une propension à marteler de la grosse caisse assez énorme. De temps en temps le chant de Fat Mike s’égare et des dissonances rythmiques surgissent, à l’instar de ce début foireux de « Leave It Alone », où il faudra s’y reprendre une demi-douzaine de fois pour lancer correctement le morceau. La première fois était sans doute un accident, les autres fois sans doute une grosse blague… Au milieu de ce déluge de tubes on entend « Franco Un-American », seul titre tiré de « The War On Errorism » avec la terrible « She’s Nubs ». On aura même le droit à la reprise décapante du hit de Rancid, « Radio », version ska/raggae, avec un refrain repris en chœur par des milliers d’haleines pas fraîches, ce qui n’a pas dû aider le trou de la couche d’ozone à se résorber… Désireux de jouer des titres qu’ils n’ont jamais joués auparavant à Londres, un peu comme ce qu’ils font avec leur second album live qui sort ce mois où ne figurent que des titres qui n’étaient pas sur le premier (et mon Dieu que cette phrase est longue), ils sortent de leurs tiroirs bien remplis bon nombre de merveilles.

« The Cause », nouveau moment de défoulement jubilatoire. Un intermède musical tiré de la série de 7inches de 2006 où le trombone revient, puis Fat Mike annonce encore une fois une nouvelle chanson. Donc pour lui les nouvelles chansons, ce sont celles de « Wolves in Wolve’s Clothing », un album qui a 1 an et demi déjà quand même… Ici elle est jouée en version entièrement électrique, avec intro revue en conséquence et résultat bien cool. Les anglais ont pour coutume de jeter sur scène tout ce qu’ils trouvent dans la fosse. C’est assez débile et du coup on voit passer des gobelets, des chaussures, des bébés, des sweats, et à un moment une chaussure à talon aiguille. Tendez-leur une perche, ils la saisissent comme au Marais, voici donc le batteur Eric Sandin en train d’utiliser le talon en question comme un rouge à lèvres. Classe.

Fat Mike annonce la dernière chanson, prenant soin de préciser que ça ne sera pas la peine d’en réclamer d’autres. Voici donc « Murder The Governement » qui vient tout balayer sur son passage. Le groupe fait mine de s’en aller, revient, « ok one more », et balance « I Wanna Be An Alcoholic ». Ils repartent, non reviennent, et ce pendant plus de 10 minutes, revenant à chaque fois nous interpréter une chanson de 30 secondes, sous les rires d’une foule qui en redemande. On aura le droit entre autres à « Instant Crassic », jolie malgré ses paroles scatophiles, « Fuck The Kids » avec les majeurs en l’air, « Fuck The Kids Part One » , et même « I Wanna Be An Alcoholic » pour la deuxième fois ! Tout le monde est hilare, et se reprend lorsque Melvin lance à la guitare l’intro de « The Brews ». C’est parti pour un dernier morceau de bravoure, où tout le monde se précipite dans le pit une dernière fois et entonne les « Oï Oï » sur les refrains.

Le morceau terminé, les lumières s’allument, la sono balance du hip-hop à fond les ballons, et les quatre punkers restent sur scène à danser un petit peu n’importe comment, avant de partir dans leurs loges. La salle commence à se vider, et tout le monde repart sourire aux lèvres, enjoués au possible de la prestation qu’ils viennent de voir. Alors qu’un bon tiers de la salle est sur le point d’en sortir, voilà que les NOFX reviennent sur scène, 5 bonnes minutes après l’avoir quittée ! Et quel retour, puisque l’intro à la basse de « Stickin In My Eye » est lâché en pâture à un public pourtant déjà rassasié ! Ceux déjà partis reviennent en courant, on espère juste que la règle à la con de « toute sortie est définitive » n’a pas été appliquée pour ceux ayant déjà mis le bout de leurs têtons dehors. Le morceau est bien interprété, même si les harmoniques de El Hefe à la gratte ont du mal à être perçues. On a même le droit à un ultime morceau : ça sera « I Wanna Be An Alcoholic », jouée pour la troisième fois de la soirée ! Et cette fois ça sera vraiment la dernière !

Un concert en tous points énorme, à l’image de ce qu’est NOFX : un groupe punk avec un répertoire hallucinant de tubes, et une décontraction exceptionnelle. Ce groupe n’a plus rien à prouver, ils le savent et en jouent, se permettant le même naturel déconcertant devant 4000 personnes que s’ils jouaient dans le garage de leur oncle pervers devant 4 potes en chemises à carreaux. Le seul reproche qu’on puisse leur faire ce soir, c’est de ne nous donner encore plus de regrets de ne pas les voir passer en France… Bon je vous laisse, le jacuzzi commence à buller.



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