C’était THE place to be. Annoncé depuis un paquet de semaines, le passage de RVIVR à Paris (comme partout où ils passaient en France d’ailleurs) avait été coché au marqueur rouge. Pensez donc, Matt Canino, ex-Latterman, débarque avec son nouveau groupe. Alors même si c’est dimanche, même si grosse cuite la veille, une bonne centaine de personnes se retrouve au... Tunnel. Descente à Cour Saint-Emilion, puis petite marche pour passer derrière les hangars de la zone, et on se retrouve face à un mur. Puis un portail. Tout au bout, un tunnel, effectivement, quelqu’un ouvre le portail, qui grince. On se croirait dans un film gore, ou à l’entrée d’un bunker à chercher un refuge à l’apocalypse imminente... L’intérieur n’est pas en reste. La salle est en fait un des nombreux hangars qui se trouvent dans le tunnel, aménagé, et très bien insonorisé.
Sur scène, les locaux de l’étape, Finally, s’installent doucement. On sait bien que les « 19h tapantes » sur les flyers correspondent au minimum à 19h30 sur le fuseau horaire des concerts de punk rock parisiens. Annoncé comme un croisement entre Jawbreaker et Joy Divison, le groupe a assurément apprécié la new wave, notamment dans les lignes de basse. La voix langoureuse accompagne les poussées rythmiques, sur lesquelles le batteur se régale, fermant les yeux et accélérant. La formule est un peu linéaire, mais très plaisante. Le groupe est parfaitement en place, peut-être même un peu trop, très concentré dans sa musique, il annonce tout à coup que « voilà, c’était la dernière ». C’est que l’ambiance est assez calme. Déjà c’est dimanche, mais la configuration de la salle (scène très haute, entrée sur le côté et WC juste à côté pour bien que tout le monde voit qui va faire quoi) doit un peu jouer, de même que les lumières fixes.
Au tour des hollandais de Hard Woor Weinig de monter sur la grosse estrade. Leur nom vient d’une expression ouvrière signifiant « dur pour pas grand chose ». Et ça leur va bien. Non pas que cela soit mauvais. Les trois lascars balancent un hardcore-punk assez banal avec beaucoup d’énergie, expliquant chaque chanson dans un anglais pas très bon, et parviennent à faire mouche sur quelques refrains. Mais leur set paraît interminable, et l’efficacité qu’ils auraient pu avoir en étant plus court a laissé place à de la lassitude, qui heureusement va se faire combler par le bar.
Le Tunnel appartient au patron du Village de la Bière, et son bar ne propose QUE des bières belges, à prix presque pas croyables (rappelons que 4 euros la pinte à Paris, qui plus est pas coupée à l’eau ou ne consistant pas en une vulgaire Kronenbourg versée dans un gobelet, ça tient plus du miracle qu’un barbu qui multiplie des pains). Les gourmets du houblon multiplient donc les aller-retours au bar, histoire de goûter les spécialités du plat pays. Outre les valeurs sûres de la Chimay ou de la Maredsous, notons la bonne prestation de la Barak, bière à 8° au goût de miel. Tiens, les hollandais ont fini, et sortent tout transpirants de scène... Une p’tite soif les gars ?...
Sans tambour ni trompettes, les RVIVR font donc apparaître leurs coupes de cheveux de footballeurs allemands des années 80. Ils tardent un peu à se mettre en place, et ce côté « amateur » colle parfaitement à l’image du groupe, à celle de son public au look « crust » soigné, ou à la salle elle-même. Par contre quand ils commencent à jouer, c’est gros smiley sur toutes les faces. Matt Canino doit être prof de riffs parfaits à l’Université du Punk, c’est pas possible. Sa petite collègue à la frange Do It Yourself n’est pas en reste, et les deux voix se répondent superbement. Chaque intro est magnifique, et il y a toute une ribambelle de refrains incroyables. Le plus parfait exemple est sans doute la chanson « Cold In Your Bones », que Samiam aurait rêvé de composer. La batterie déroule, les cordes de guitares sont étouffées, le riff déboule, la mélodie coupe le souffle, les « oh-oh » sont lâchés, et le final sort de nulle part, quand est clamé « Radio, radio, sing a song that I know ». Si les disques étaient déjà remarquables, la portée que prennent en live des titres comme « Cut The Chord » ou « Seethin » (tirée du dernier EP, Dirty Water) est assez démentielle.
Le sourire est omniprésent, vissé sur les visages des spectateurs, mais aussi sur celui des musiciens, surtout des deux filles (guitariste-chanteuse et bassiste). C’est une grosse claque, assurément, et le set est passé beaucoup trop vite. Le rappel est aussitôt réclamé, et obtenu. Même si ils semblent (et surtout sentent !) ne pas s’être lavés depuis plusieurs jours et d’en chier, les RVIVR remontent tout de même sur scène pour une dernière rasade de bonheur. Ouais, c’était vraiment THE place to be...