INTERVIEW : Carving

Salut les gars ! Très heureux de vous interviewer depuis le temps que j’écoute votre zik. L’album « I wish I was… » doit être un des tous premiers albums français qui a été chroniqué chez nous à PunkFiction. Rentrons dans le vif du sujet : votre deuxième album s’est pour le moins fait attendre ! Les différents changements dans le groupe y sont sans doute pour quelque chose mais ça n’explique sans doute pas les 4 ans d’attente… Pouvez-vous revenir sur l’évolution du line up du groupe et les raisons de ce délai ?

• Le deuxième album s’est fait attendre parce qu’on n’a pas trouvé de partenaire pour le sortir et parce qu’on a eu pas mal de départs au sein du groupe dus pour la plupart aux changements que t’impose dans ta vie l’évolution dans la musique, ça te prend tout ton temps, tout ton argent et toute ton énergie souvent pour de maigres résultats.

Est-il vrai que le groupe avait décroché un budget conséquent pour réaliser « One’n’all… », c’était quoi au juste, un genre de tremplin ?

• Faux on a eu 8000 € de Domaine Musique et cette argent équivaut à un compte chez eux dans lequel tu peux piocher jusqu’à échéance mais tu dois justifier toutes tes dépenses… cet argent a servi à plein de choses notamment à financer nos dates loin de Lille (location de camion, frais de route….) et plein d’autres choses. L’album a été financé par tous les cachets Carving qu’on a gardé depuis 5 ans.

Depuis sa sortie le second album a provoqué pas mal de remous dans le microcosme des internautes fans de punk rock. Les avis sont pour le moins tranchés. Sans en venir à la forme qu’est-ce qui explique que votre public soit si clairement partagé à votre avis ?

• Je crois que le microcosme des internautes fans de punk-rock est un monde fermé et exigeant et peu enclin à l’évolution (ndr : on fait de notre mieux pour ne pas en faire partie héhé...). Ce même public nous a conspué quand on a commencé à faire du ska… notre album pour nous c’était ça ou mourir alors je suis tellement content d’être toujours là que le reste m’importe peu. Cela dit on tient compte de toutes les critiques c’est toujours instructif et formateur. Après on est un groupe de live et ce qui fait plaisir c’est d’avoir de nouvelles têtes en concert, des gens pas forcément issus du microcosme mais qui veulent s’ouvrir a autre choses, c’est toujours intéressant ce genre de choses.

Bon venons-en à la forme maintenant alors. L’album a suscité des commentaires acerbes et virulents à votre encontre. Au-delà du droit de chacun à avoir un avis qu’est-ce qui vous a le plus affecté dans tout ça ?

• Que les gens parlent sans savoir, et surtout on s’est rendu compte que les gens en avaient pour certains rien à foutre de savoir parce que Carving ne rentrait pas dans leur norme… et c’est dans ces moments là que je suis fier de faire du punk/rock du vrai celui ou t’emmerde tous les systèmes quoi qu’il arrive. En ce qui concerne les attaques personnelles je ne vais pas me mettre au niveau de leurs instigateurs en y répondant.

Puisqu’on parle de tolérance et pour changer de ce sujet finalement sans grand intérêt : Mat, je ne sais pas si c’est une question con ou hors de propos mais il me semble qu’on aborde pas souvent ce sujet dans le punk rock : tu es noir, le savais-tu ? :o)

• Je suis noir et je n’en tire aucune fierté je suis pas de ces gens fiers de leur racines... pour moi cette notion est une pure connerie, nos racines sont communes et la culture universelle. Je suis curieux de tout et fervent défenseur du respect de l’individu dans sa globalité après qu’il soit noir blanc jaune on s’en bat les couilles, le remarquer c’est déjà faire une différence. On est tous citoyens du monde nos vies sont différentes et c’est ça qui les rend enrichissantes.

Plus sérieusement, comment vis tu ça dans un genre musical qui se dit anti-raciste, prônant la tolérance et où les gens de couleur sont pourtant très rares alors queça pourrait beaucoup l’enrichir ? Dans une époque aussi où l’affirmation de sa minorité pour désigner (voire cloisonner) un genre devient de plus en plus forte : christian punk, queerpunk (un label gay vient d’être créé par Sony music)…

• La parcellisation de la société amène au racisme, la différence est nécessaire si on veut évoluer. Les problèmes qui touchent tout le monde seront avec ces nouveaux systèmes traités en partie selon qu’ils affectent ou non la minorité concernée. On va droit dans le mur, personne ne m’a demandé avant toi si ça me faisait bizarre d’être noir et d’être punk parce que je ne revendique pas cela (ndr : euh, je t’ai demandé si ça te faisait bizarre d’être noir ? Nan j’crois pas, ça c’est du procès d’intention mec, je te demandais juste en dehors de ton cas personnel comment tu expliquais que le punk rock reste une musique encore très "blanche", ce que je trouve dommage). On s’en tape le tout est de prêter attention à l’autre rien à branler de la tête qu’il a, de son milieu…

Toi tu essaies d’apporter pas mal de mélanges, d’influences étiquetées sans doute à tort « musique noire » : le ragga (uniiiiique !), les musiques des caraïbes comme sur la fin de « Dates », un certain groove dans ton phrasé… Pourquoi moins sur ce second album ?

• je n’ai aucune culture africaine mon histoire personnelle a fait que je n’en ai pas eu. Ces inflences à la base ne viennent même pas de moi mais de notre premier batteur qui était fan de cet horizon musical. Je l’ai découvert avec lui et j’ai kiffé certaines choses alors j’ai travaillé pour essayer de produire ces sonorités nouvelles et voilà. A la base je suis un grand fan de death métal (morbid angel, brutal truth…) alors le reggae c’était bien loin de mes horizons musicaux mais en m’y intéressant j’y ai découvert des plans vraiment sympa que j’ai eu envie de reproduire. On a du faire une sélection dans les morceaux quand on a fait le deuxième album et il est vrai que les morceaux avec ces tendances étaient moins aboutis, mais t’inquiète le troisième album ne te décevra pas.

De manière générale on a l’impression sur ce second album que vous avez essayer d’autres choses, que vous avez voulu, comme pour ce dont je parlais au-dessus, ne pas aller là où l’on vous attendais, non ?

• Peut être, l’album est plus sombre mais nous étions aussi dans cet état d’esprit.

Et le chant en français pourquoi ce choix (sur 3 morceaux sur 13 rappelons-le).

• Pour essayer…

Le troisième album sera plus une synthèse ou une autre évolution ?

• Ce sera la guerre : on a un line up solide , on est structuré pour sortir ce qu’on veut on a la rage et l’envie de tout niquer, on est déjà en train de le préparer. Musicalement ? disons qu’on a retrouvé notre grain de folie...

Carving faisait du reggae/ska à ses débuts ? Comment s’est passé le recrutement des deux cuivres ?

• Ah non on a toujours été un groupe de punk/hardcore. Les cuivres c’est vraiment nouveau pour nous et puis y’a pas eu de recrutement on avait comme potes mamath et lio qu’ on invitait régulièrement à faire les cons avec nous et puis on a officialisé les choses.

Pas mal de gens ou même de sites de VPC vous référencent comme étant signés sur Wagram. Pouvez-vous clarifier la nature de votre deal avec eux et comment s’est passé la fin de votre contrat avec Dialektik records, votre arrivée sur LGM ?

• Le Label LGM nous a permis d’être distribué par Wagram dans toutes les Fnac, c’est juste une distrib Wagram ils ne font rien d’autres pour nous. LGM nous ont aussi payé le pressage et des affiches, c’était le coup de pouce de Marcel Et Son Orchestre à notre égard (ndr : LGM est le label des Marcels). Pour le reste on s’démerde.

Quel regard portez-vous pour les anciens du groupe sur des morceaux comme « Liza » ou « Jessie », « Hardskimboarding » ? Ces morceaux très longs, avec pleins de plans, de changements de styles qui étaient super jouissifs à écouter ?

• Pour le troisième album on a essayer de faire le point sur toutes les bonnes idées qu’on a eu au cours du temps et ces morceaux en font parti.

J’ai entendu des tonnes de ragots sur vous : potes avec Kyo, fashion victims hautaines qui fument des cigares dans les backstages… N’est-ce pas finalement bon signe pour la popularité d’un groupe de voir qu’il aiguise aussi les rancœurs, les jalousies ?

• Ceux qui nous connaisse savent qu’on est loin d’être tout ça.on s’est jamais inscrit dans aucun système et on continue d’exister forcément au bout d’un moment ça en énerve certains tant pis pour eux… Perso j’aime pas les conflits inutiles c’est exactement ce qu’on dit dans "fight is elsewhere" (le combat est ailleurs).

Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour l’avenir ?

• Des dates, de ne pas changer, de continuer a faire la musique qu’on aime et surtout que nicolas sarkozy ne soit pas président…

Merci d’avoir pris du temps pour répondre à cette interview.

• Keep on rockin’ rocker !!!

Interview réalisée par Punkachu ! (merci à Mitsouko pour son coup de main...)