Contexte :
Après le succès français de Owari Wa Konai, le seul et unique album de 1000 Travels Of Jawaharlal, le fondateur du label Pure Pain Sugar eut la bonne idée de proposer au Japonais un split EP avec les Français d’Aghast. Pour les Tarbais, il s’agissait là de leur troisième production, après un premier split et un album. L’objet est paru en 2004 et est une belle réussite.
Chronique :
Je place la galette dans le lecteur. Je m’assieds confortablement. Je monte le volume de la chaîne. J’appuie sur « play ». Et je me laisse enivrer. La musique jouée par ces deux groupes est une véritable expérience. Je ferme le poing, je serre les dents, je ferme les yeux. Aghast (qui signifie "atterré") est le premier à me prendre aux tripes, les cris du chanteur me parcoure l’échine, les murs de guitares me hérissent le poil. Je suis assailli par ce screamo agressif, intense, saisissant. Touché au plus profond par ces riffs tranchants, pris à la gorge par ce chant arraché, mis à mal par cette rythmique lourde et pressante, puis acculé par un passage plus lent, avant d’être bombardé d’une avalanche de coups montant crescendo jusqu’à l’explosion (« Oxygène »).
« My Friend Slobodane » termine la partie française de ce split en nous faisant passer par toutes les émotions, alternant entre pilonnage en règle et incartades plus tendues. Les Tarbais (que je ne connaissais pas jusque là, honte à moi) assènent ici quatre mandales que ne renierait pas Yaphet Kotto. Quatre morceaux monstrueux de puissance, de force, d’intensité. Massif et à la fois aiguisé, Aghast fait étalage de toute sa classe et laisse la lourde tâche aux Japonais de conclure ce split parti sur un niveau impressionnant.
Mais le trio de 1000TOJ ne se laisse pas abattre et balance ces trois (trop courts) morceaux sans fléchir. Un peu plus urgent que les Français, les Japonais évoluent cependant dans les mêmes sphères avec d’ailleurs à peu près les mêmes qualités : chant rugueux au possible, riffs incisifs jusqu’à la moelle, ligne de basse grondante. La grande particularité du combo nippon est d’avoir une ligne de chant peu mise en avant, comme sur leur album, et qui joue plus le rôle de quatrième instrument – d’autant que Kojak braille dans sa langue natale. Assez surprenant au début, cela ajoute finalement une couche d’intensité à une musique qui n’en manque pourtant pas. Le trio appuie sur la corde émotionnelle grâce des passages tendus comme jamais et des moments de pure frénésie musicale (« Orireba Iidake » et son petit riff de gratte jouissif). Les Japonais sont à la hauteur et permettent à ce split de flirter du début à la fin avec les émotions les plus profondes. 1000TOJ et Aghast font partis de ces groupes qui mettent toutes leurs tripes dans leur musique, qui te prenne à la gorge et ne relâche jamais l’étreinte, qui t’emportent dans leurs méandres musicaux et pénètrent tout ton être de leur riffs assassins…
On ne regrettera donc qu’une chose, un petit titre en plus de la part des Japonais, ce qui aurait équilibré un peu ce déjà superbe EP. Ah, et autre chose aussi, que ce split soit sold-out et donc quasi introuvable aujourd’hui… Pourtant, une telle galette mérite que l’on fouille le moindre bac poussiéreux de disquaires pour mettre la main dessus.
Note : 18 / 20
Année : 2004
Durée : 22 minutes
Labels : Pure Pain Sugar
Tracklist :
01. Aghast - Télescope
02. Aghast - Oxygène
03. Aghast - Medium Is The Message
04. Aghast - My Friend Slobodane
05. 1000 Travels Of Jawaharlal - Jibun Ga Tatteiru Tokoro
06. 1000 Travels Of Jawaharlal - Teo Nobaseda
07. 1000 Travels Of Jawaharlal- Orireba Iidake